1. Haunted House


    Datte: 01/02/2019, Catégories: jeunes, revede, massage, conte, fantastiqu, fantastiq, Auteur: Mirthrandir, Source: Revebebe

    La petite baraque était coincée entre un tir à pipes et une énorme remorque encombrée de tout un bric-à-brac de peluches, jouets, radios portables, électroménager, bouteilles et lots divers susceptibles d’attirer les amateurs de cette sensation forte consistant à échanger son fric contre des billets de tombola en espérant gagner autre chose qu’un canif ou une boîte de crayons.
    
    C’était juste une petite façade en bois, étroite, peinte de couleurs jadis criardes mais à présent écaillées et délavées, représentant monstres, sorcières et crapauds baveux si effrayants qu’ils auraient fait se tordre de rire le plus couard des gamins de dix ans.
    
    Une maison à un étage censée être hantée par tous les fantômes de l’enfer et d’ailleurs, et qui portait l’inscription "Haunted House" en lettres rouges dégoulinantes au-dessus de l’entrée.
    
    — On y va ? demanda Kim.
    — Où ça ? Là-dedans ? Tu déconnes ou quoi ?
    
    Rémi ne voulait pas, mais elle s’y attendait. Lui, il voyait cette minuscule et minable baraque foraine, comme issue d’un autre âge, et à laquelle personne ne s’intéressait. Il ne lui serait même pas venu à l’idée d’aller gaspiller son temps et quelques sous dans cet obscur taudis.
    
    Kim voyait surtout le petit vieillard à barbichette, assis derrière la vitre, près de l’entrée, et qui avait un bref instant levé vers elle un regard triste, comme suppliant, avant de retourner à la lecture du vieux livre qu’il tenait ouvert sur la tablette du guichet, devant lui.
    
    — Il a ...
    ... l’air si malheureux, ce petit vieux.
    — C’est le moins qu’on puisse dire.
    — Nous serons peut-être les seuls à visiter sa maison aujourd’hui.
    — Les gens ne se bousculent pas au portillon, en effet, ricana Rémi.
    — On ferait ainsi plaisir à quelqu’un, insista Kim.
    
    Rémi se demanda si son amie avait un jour pratiqué le scoutisme actif plutôt que la télévision pantouflarde.
    
    — Ta B.A. quotidienne, en quelque sorte.
    
    Le petit vieillard leva à nouveau ses yeux tristes, par-dessus les lunettes rondes posées de guingois sur le bout de son nez, et regarda un instant le jeune couple immobilisé à quelques pas.
    
    — Je suis certaine que ça lui ferait plaisir.
    — Toi et ton cœur d’artichaut ! dit-il en riant et en la serrant dans ses bras.
    
    Ils s’étaient rencontrés sur le campus universitaire, quelques mois plus tôt, et avaient craqué l’un pour l’autre. Ils ne parlaient pas d’avenir à deux. Pas ouvertement, même s’ils y pensaient parfois. À vingt ans, on n’est pas pressé de se fixer. La première échéance importante était la réussite de cette année d’études. Le reste viendrait après, en son temps.
    
    — T’inquiète, dit Kim en s’avançant, c’est moi qui paie.
    
    Elle déposa quelques pièces sur la tablette, et le vieil homme lui tendit deux minuscules tickets, dont il avait déchiré lui-même le talon.
    
    — Bon amusement, mademoiselle, dit-il d’une voix fluette.
    
    Il regardait Kim en souriant et, de la main, lui indiqua l’entrée de la maison. Il avait des yeux très pâles, d’une teinte ...
«1234...10»