La défense Caro-Kann
Datte: 05/01/2019,
Catégories:
nonéro,
policier,
Auteur: Brodsky, Source: Revebebe
... assassiner un enfoiré comme Ratelier, c’est plus que suspect, vous ne croyez pas ?
— D’où ma maladresse concernantUn singe en hiver.
— Sauf que ce n’est pas à un vieux singe qu’on apprend à faire des grimaces. Pas très moral, tout ça, mais bon… « La morale est souvent le paravent qui permet de masquer nos lâchetés. »
— Ratelier ?
— Non, Nietzsche. Allez, cassez-vous.
Balèze, l’inspecteur… mais il n’avait aucune chance. Il avait pourtant brûlé en évoquant le contrat mis sur la tête de Ratelier, mais je n’avais pas déboursé un euro là-dessus. Deux mois avant, à Cannes, la cible que j’avais touchée était un violeur multirécidiviste protégée par sa position de notable. La victime qui avait demandé ce service était ce jour-là en déplacement pour son entreprise à Clermont-Ferrand. En échange, elle avait éliminé le créancier véreux d’un patron pêcheur de Calais parti en mer avec ses gars le jour de l’exécution. Et c’est ce même patron pêcheur qui s’était occupé de Ratelier. Imparable ! Nous avions tous des alibis en béton, aucun rapport direct avec nos cibles, et nos cibles ne se connaissaient pas. Nous communiquions par un service de messagerie ...
... cryptée, et le seul lien qui aurait pu être établi était que nos « victimes » étaient des enfoirés qui avaient suffisamment d’ennemis pour être abattues par n’importe qui.
Oh, bien sûr, tout ça, ce n’est pas très moral… Mais la morale est le paravent qui permet de masquer nos lâchetés, comme disait l’inspecteur. En disant cela, il m’avait signifié clairement que pour lui, la chasse à l’homme n’était pas loin d’être terminée. Mort d’un salaud… et puis après ?
Pour les amateurs d’échecs : après sa première victoire sur Karpov, Kasparov a écrit un livre qu’il a appeléEt le fou devint roi. Quand, au cours de la revanche, Karpov ressortit la défense Caro-Kann de sa boîte à malices, il a cru qu’il serait obligé d’écrire une suite :Et le roi devint fou.
Aujourd’hui, le roi est nu, et c’est le monde qui est devenu fou. Les méchants passent pour des gentils, et les gentils pour des méchants. Mais pour un joueur d’échecs, le bien et le mal n’existent pas. Il y a les blancs et les noirs, un champ de bataille, et le plus fort l’emporte.
Et moi, j’ai emporté Anna qui n’est au courant de rien.
« The winner takes it all », comme on dit.
Moralité ?