1. CHAPITRE 14 : Enfants


    Datte: 17/12/2018, Catégories: Entre-nous, Les hommes, Auteur: Cramache, Source: Hds

    ... l’attente, nous recevons la réponse, notre de-mande est acceptée. On suit alors les deux formations obligatoires pour obtenir le Diplôme d’Etat d’Assistant Familial. Peu de temps après, une assistante so-ciale arrive avec un jeune garçon de douze ans. Il s’appelle Samuel, et il vient de perdre ses parents. L’assistante sociale a fait exprès de nous confier ce garçon à cause de mon passé. Cette première mission m’excite et m’effraie en même temps. Elle nous fait un rapide topo, la pauvre a l’air surmené :
    
    -Ses parents sont morts dans l’incendie de leur maison, l’enquête est en cours.
    
    -Et le garçon ?, demande Sylvain d’une voix douce.
    
    -Il dormait chez un ami. Ecoutez, il est très en colère, c’est arrivée hier soir.
    
    -Je le comprends, dis-je. J’étais pareil, on va lui laisser un peu de temps.
    
    -Ce n’est pas tout. Attendez, oui, voilà, vous devez l’emmener demain au commissariat. Tenez, c’est une copie de son dossier pour vous. Il y a toute la paperasse dedans. Soyez prudent, il a frappé plusieurs personnes.
    
    -Ne vous inquiétez pas, intervient Sylvain, on va gérer.
    
    L’assistante sociale nous quitte, un peu inquiète quand même. En haut, j’entends un bruit de meuble qui craque. A part la fenêtre, rien ne peut casser, tout est en bois massif. J’attends dix minutes, et je monte, les mains dans les poches. J’entre sans frapper. Comme je m’y attends, les draps sont défaits, les oreillers sur le sol, les couvertures par la fenêtre. Le sac de Samuel, lui, est intact, ...
    ... preuve qu’il y a dedans quelque chose de précieux pour lui. Samuel frappe le mur en criant, il a le poing en sang. Je l’arrête avant qu’il ne se casse la main.
    
    Samuel me repousse et tente de recommencer. Je lui attrape les bras, il se dé-bat. Il me donne des coups de pieds, m’insulte, m’échappe à nouveau, je le re-tiens. Je me rappelle ma propre expérience, les éducateurs avaient agi comme moi, et ça n’avait pas eu beaucoup d’effets. Je persiste tout de même, Samuel a besoin de sentir qu’on est là pour lui. Il pousse d’autres hurlements de bêtes blessées, et continue de m’insulter, de me menacer. J’ai fait pareil et pire. Ses forces finissent par l’abandonner, son corps mince se ramollit. Sa gorge se noue, des larmes coulent de ses yeux marrons. Il s’écroule au sol, vaincu. Je le porte sur le lit, et je m’assois près de lui :
    
    -Pardon, dit-il entre deux sanglots, je voulais pas faire ça. Vous avez l’air gentil.
    
    -Tu peux nous tutoyer, je m’appelle Loïc, et en bas, c’est Sylvain, mon compagnon. C’est ta maison ici, le temsp que ça durera.
    
    -Merci. Mes parents vont vite venir me chercher.
    
    -Je suis désolé, mon bonhomme, ils sont morts. Je sais ce que tu tra-verses…, commencé-je d’une voix douce.
    
    -Mes parents sont pas morts, tu ne sais rien, s’énerve-t-il.
    
    -Mes parents sont morts quand j’avais à peu près ton âge, continué-je sur le même ton. Accident de voiture, j’ai vécu en foyer pendant cinq ans. Pour l’instant, tu luttes contre la réalité, pour toi, c’est ...