1. L'appel


    Datte: 11/02/2018, Catégories: forêt, campagne, voyage, train, nonéro, mélo, Auteur: Musea, Source: Revebebe

    ... souligne la mélodie du vent et il me regarde avec ce petit air malicieux, aimant et bienveillant qu’il avait toujours. Je lui demande à brûle-pourpoint :
    
    « Pourquoi, pourquoi tu n’as pas écouté tes cousins qui te disaient de faire voir ton cœur ? Tu me manques tellement ! Je me sens si désemparée, si seule depuis que tu n’es plus là. »
    
    Un silence, un sourire doux et puis :
    
    « Je sais… mais ça n’aurait pas changé grand-chose… Faut bien mourir d’un truc et puis je veille encore plus sur toi depuis que je suis là-haut, ma grande, je t’abandonnerai jamais. T’étais pas ma fille officielle mais tu sais que tu l’étais dans mon cœur et je sais aussi que j’étais devenu ton père. Moins que Dieu, évidemment, parce que çui-là c’est décidément un drôle de zig. Tu m’en parlais, avant, Maman aussi, mais j’y croyais pas. Je respectais mais sans vouloir y adhérer. Maintenant je sais. J’ai reconnu les sensations, l’amour, tout ce que tu me disais de Lui. Et je peux voyager partout. Je te suis, je suis à la fois sur la banquette et dans le paysage. T’as senti? La magie c’est aussi ça et je t’assure c’est super moins crevant qu’avec mes cannes ou la voiture. »
    
    J’ai envie de rire à l’entendre, repousser les larmes qui roulent malgré moi. Je cherche un mouchoir dans mon sac. C’est complètement dingue de se faire interpeller par un mort dans un train. N’empêche, c’est réconfortant. Je me mouche bruyamment, tant pis pour la voisine concentrée sur ses mots croisés. Faut faire sortir le ...
    ... chagrin… Je dois avoir le nez rouge, des yeux de lapin russe et les cheveux en bataille. Intérêt à me refaire une beauté avant de revoir les amis venus m’attendre à la gare.
    
    — Dis… va mouiller un peu ton visage aux toilettes. Mes potes supporteraient pas de te voir en eau comme ça, hein? Ça leur ferait trop de peine. En tout cas je suis content. Content que tu viennes me voir et voir mes parents, ma grand-mère, content que t’ailles voir la maison, et que tu tiennes la dragée haute aux salauds. T’en fais pas, va… S’en tireront pas comme ça, contre toi. Je m’arrangerai. Toi, t’auras qu’à tenir le coup. Et tu lâches pas, surtout. Jamais. Ça leur ferait trop plaisir, hein ?
    — Promis. Tu sais que je peux pas te refuser. Tu m’as tellement aidée… rien que pour ça, je dois tenir, tu comprends, et puis, malgré la méchanceté de mon père, il méritait pas une fin pareille et d’aussi barjots autour de lui pour l’achever.
    — S’il t’avait écoutée… Et s’il m’avait écouté aussi. Mais c’était une tête de mule d’auvergnat. Une vraie bourrique, comme sa mère, ton père. Moi aussi, mais au moins quand j’avais tort, je le disais. Et je faisais un effort pour changer. S’pas Maman?
    — C’est vrai. Dis, ma petite, dis… tu fais attention à toi, n’est-ce pas? Et faut que je te remercie parce que t’as été le dernier rayon de soleil de mon fils et de moi. Quand tu me racontais chez moi qui ne voyais plus rien, que tu me parlais de tes aquarelles, des miracles de l’eau, du voyage des couleurs dans la ...