SDF - Histoires de Sexe

SDF

... énervement.

— Putain ! Quoi encore ? criai-je en baissant la fenêtre, prêt à me lui lancer une nouvelle saillie encore plus virulente.

Je lève les yeux et je la vois qui pleure :

— Je suis désolée, me dit-elle, sincèrement, puis elle se retourne et s’éloigne.
— Oh ! Bordel ! me murmurai-je.

J’ouvre la portière et sors de la voiture.

— Je suis désolé, moi aussi. J’ai juste senti que vous aviez besoin de faire un vrai repas. Vous n’étiez pas censée savoir que ça venait de moi.

J’essaie de paraître contrit. Une tentative assez lamentable, il faut bien le reconnaître.

— J’avais faim, mais je ne suis tout simplement pas prête à recevoir de l’aide. Si je le fais, alors ça voudra vraiment dire que je suis au fond du trou.

Elle s’est arrêtée, cependant elle ne s’est pas retournée vers moi. J’ai la nette impression qu’elle pleure encore.

— Écoutez, j’ai un peu de temps avant de devoir retourner à mon bureau. Voulez-vous que je vous dépose quelque part ?

J’espère un « non » pour que nous puissions nous séparer dans des conditions décentes et que je puisse retourner à ma petite vie insipide. Je veux juste qu’elle arrête de pleurer.

— Je n’ai plus nulle part où aller.

Elle ne me regarde pas en disant cela et j’ai un peu peur de l’approcher. Je sens bien qu’elle aurait besoin qu’on la prenne dans les bras, mais je ne la connais pas et la pensée d’une nouvelle rebuffade me paralyse. Pour me donner une contenance, je ferme la portière et je m’assieds sur ...

... le capot de ma voiture. Je ne peux tout simplement pas la laisser pleurer seule, là au milieu du parking.

— Et vos parents ?
— Je n’y retournerai pas. Ils ne me laisseraient pas entrer de toute façon.

Elle se retourne et je constate que de longues coulures noires maculent ses joues. Visiblement, dans son budget, le mascara a une priorité plus élevée que la nourriture.

— Des amis ?

J’essaie de l’amener à réfléchir plus posément. Elle ne se rapproche pas de moi, ce qui me semble une bonne chose. C’est néanmoins bizarre d’avoir une conversation personnelle avec quelqu’un qui est à plus de trois mètres de soi.

— Je les ai tous sollicités. Certains d’entre eux ne veulent même plus me parler.

Et la voilà qui se remet à pleurer doucement. N’ayant jamais eu d’enfants, je ne sais pas gérer une situation un peu complexe comme celle-là. Les rares fois où ma femme pleurait, je pouvais simplement la tenir dans mes bras. Mais là, je ne sais pas comment gérer cette fille.

— Au fait, je m’appelle Alain, et vous ?

J’essaie de changer un peu du sujet pour arrêter ses pleurs.

— Emmanuelle. Mais la plupart des gens m’appellent juste Emma.

Emma lui convient bien mieux qu’Emmanuelle. Emmanuelle est un très joli prénom, mais dans la situation où elle est en ce moment, je trouve qu’Emma semble plus adapté.

— Emma, vous savez qu’il y a des associations qui peuvent vous aider dans ce genre de… situations ?

J’étais sur le point de dire sans-abri, mais je trouve que ...