France rurale (5)
Datte: 04/04/2022,
Catégories:
Gay
Auteur: Calinchaud, Source: Xstory
Je me suis mis au travail comme un forcené, même si ma démarche était hésitante, mon fondement me cuisait encore, mais je voulais respecter ce « pacte ». A la ferme, j’étais un ouvrier comme les autres qui certes, vivaient dans la demeure familiale, Pierre ayant informé tous ses employés que j’étais le fils de son meilleur ami de régiment et qu’à ce titre, il me considérait comme un membre de la famille. Il n’y avait donc aucune jalousie envers moi, surtout quand ils m’ont vu à l’œuvre, j’accomplissais ma part de l’ouvrage comme tous les autres, sans aucun traitement de faveur.
J’avais même refusé le déjeuner avec « les maîtres » comme on disait à l’époque, partageant avec toute l’équipe, le casse-croûte que Thérèse avait préparé. Cette femme était... incomparable... D’une finesse d’esprit qui me surprenait de jour en jour.
En la rejoignant dans la cuisine ce matin-là, un peu plus tardivement que les autres, ma gaucherie m’a repris, sentiments mêlés de honte, elle ne pouvait pas ignorer comment ma nuit s’était déroulée, mais aussi d’une admiration totale et d’une tendresse que je n’avais jamais éprouvée, même pas pour ma mère.
— Approche-toi gros benêt... Tu as encore faim ?
— Non, merci Thérèse, mais je voudrais vous demander quelque chose.
— Combien de fois il faudra qu’on te dise de nous dire TU, à Pierre et à moi ?
— Je ne le pourrais jamais Thérèse.
J’ai passé des années auprès d’eux, les plus belles de ma vie, sans doute, mais je les ai toujours ...
... vouvoyés, même pendant toutes les nuits que j’ai passées avec Pierre.
— Tu veux quoi mon beau ?
— Vous pouvez me préparer un casse-croûte pour midi ?
— Mais... Tu n’en as pas besoin... Tu déjeunes avec nous, bien sûr.
— Non Thérèse, ce n’est pas que je ne le veux pas, mais je suis un valet de la ferme, je partage mon travail avec les autres. Je ne veux pas qu’ils sentent une différence. Je veux être soudés avec eux, et qu’ils sachent que je fais partie de leur équipe aussi... Pas le Chouchou du Patron... Et le rituel du casse-croûte en fait partie.
Le panier-repas pour les ouvriers était déjà prêt, toujours très copieux et dans lequel elle a ajouté une ou deux choses que je n’ai pas regardées.
Vers 13h, comme d’habitude, la femme de salle nous l’a apporté, étalant d’abord une grande nappe à carreaux sur la longue table au coin de la grange et disposant ces victuailles simples, mais abondantes, pour remplir les estomacs de ceux qui travaillaient dur, sans ménager leur peine.
Michel était resté avec nous, se restaurant pour la première fois, autour de cette tablée qui respirait la bonne humeur. Les ouvriers découvraient un autre Michel, jovial, rigolant aux blagues quelque peu salaces. Le fils du Patron était avec eux, partageait leur repas, détendu, et semblant heureux. Il n’était certes que le cadet des deux frères, mais c’était si surprenant pour eux.
Pierre avait instauré une pause d’au moins une heure, laissant libre à chacun de vaquer à sa guise, ...