1. Flora, une femme complexée ou comment conjurer le bonheur


    Datte: 01/06/2018, Catégories: fh, complexe, fête, amour, Auteur: Laure Topigne, Source: Revebebe

    ... voyant. Il la tira violemment à l’intérieur en balbutiant :
    
    — Mais pourquoi, pourquoi donc m’as-tu infligé cela ? Promets-moi de ne jamais recommencer ou va-t’en tout de suite.
    
    Elle promit. En sanglots, ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre, se retrouvèrent bientôt dénudés sans avoir souvenir de s’être déshabillés.
    
    Comme la fois précédente, ils montèrent sur leur nuage, s’y perdirent pour mieux se rejoindre. Ils rirent à l’unisson, pleurèrent chacun à son tour broyé par les embrassades de l’autre. Ils vécurent des étreintes forcenées suivies d’abandons alanguis, des baisers ignés et des caresses suaves pareilles à des zéphyrs. Ils nouèrent jambes et bras dans des enlacements inextricables. Accompagnés de pépiements stridents et d’ahanements gutturaux, ils communièrent de cyprine et de foutre. Un néant délicieux les plongea dans des comas radieux dont ils sortaient revigorés. Ils goûtèrent à cette fusion totale des cœurs, des pensées et des sentiments.
    
    Enfin, épuisés, ils sombrèrent dans les rets de Morphée en se berçant de la même idée, celle de s’être reconquis, d’avoir partagé, en dépit d’une insensible fêlure, un bonheur égal à celui connu un mois plus tôt.
    
    -ooOoo-
    
    Dans les jours qui suivirent, elle s’installa chez Frédéric tout en conservant son appartement où elle se retirait parfois afin de ne pas le gêner et de conserver son indépendance. Ils connurent une période exquise, qui conjugua les élans de leurs cœurs et de leurs corps. Chaque minute ...
    ... s’anima de complicités malignes, toute décision fut prise d’un commun accord et le plus insignifiant de leurs gestes s’empreignait de douceur et de tendresse. À les voir, on eut dit un couple d’adolescents s’initiant aux jeux de l’amour et, il était vrai, que ce fut la situation de Flora. Elle s’épouvantait à l’idée que cela ne dure, craignait de l’ennuyer ou de lui paraître mièvre. Souvent, elle s’ingéniait à le surprendre et, n’y parvenant pas, se désespérait d’être si prévisible.
    
    Cet apaisement fut éphémère. Lorsqu’à peine plus tard, Frédéric l’invita à participer à une soirée avec des copains qui se révélèrent être surtout des copines, il lui dit : « Je compte sur toi pour être resplendissante ». Ces mots exprimaient une conviction, elle les entendit comme une injonction. Il les prononça en toute innocence, sans se rendre compte, et précisément ce fut cela qui engendra le malaise de Flora : il ne se rendit pas compte. Cette phrase lui fit l’effet d’un camouflet, s’il l’enjoignait à briller c’était que, d’une façon générale il devait lui reprocher de ne guère le faire. Tout ce qu’elle avait mis sous le boisseau resurgit avec une intensité renouvelée. Ce soir-là, il put être fier d’elle. Assurément, elle se montra éblouissante et prolixe plus que jamais, cachant aux autres ainsi qu’à elle-même la boule qui crispait ses entrailles. Elle ne dormit pourtant pas de la nuit, ressassant encore et toujours, indéfiniment, l’unique question : mais qu’est-ce donc qui peut me valoir ...
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