Next stop
Datte: 12/02/2021,
Catégories:
Entre-nous,
Les hommes,
Auteur: Dim, Source: Hds
Mon t-shirt est trempé : il se colle à mon corps et forme comme une seconde peau, glacée. Mon jean m’enserre dans une nasse humide, il épouse si bien mes cuisses qu’il m’est difficile de marcher. La pluie me cingle le visage et inonde les yeux, j’y vois à peine, de toute façon il n’y a rien à voir : des champs à perte de vue. Cela fait deux heures que je suis ainsi comme un con sous la pluie à suivre à pied cette route qui mène je ne sais où. Comment en suis-je arrivé là ? Simple, je me suis fait larguer en pleine cambrousse par mon chauffeur de covoiturage. On s'est méchamment disputé… Au début tout allait bien, on sortait des banalités, il avait même de l’humour, puis au fil des heures il a fallu meubler et on s’est aventuré sur des sujets plus risqués. Et en fait le mec, il avait de la merde en barre dans le cerveau et j’ai mis les deux pieds dedans. Cela ne m’a pas porté chance alors me voilà à marcher seul et à me faire rincer. Je n’ai même plus ni portable ni carte bleue… le type est parti en trombes dès que j'ai quitté sa bagnole ; mes affaires étaient sur la plage arrière et elles y sont toujours. De toute façon la Mastercard ne m'aurait pas trop servi ici, tandis que pour le mobile, on doit rien capter dans ce no man's land. Bref je suis bien dans la mouise ! Me voilà sur cette route depuis une éternité et toujours pas une voiture tandis que la nuit commence à tomber. Les arbres commencent à former des silhouettes fantomatiques dans la brume. Dans quelques instants ...
... je vais entendre les loups hurler. L'angoisse. Je suis frigorifié et j’ai carrément le moral dans les chaussettes. J’en suis là quand j'entends derrière au loin le bruit d'un moteur. Je me retourne et fais des grands signes comme un taré ; il faut que ce type me prenne. Mes espoirs sont vite douchés, la caisse me passe devant tout et m’engloutit sous une gerbe d’eau. C’est la deuxième en trois heures, j’en pleurerais.
J’en suis là, totalement dépité, à me demander comment je vais m’en sortir, quand je vois deux lueurs rouges immobiles percer dans la brume, à cinquante mètres. Incroyable, la voiture s’est au final arrêtée. Je cours et m'engouffre dans la caisse. "Merci tu es mon sauveur !". Le mec m’accueille par un grand sourire et démarre. On se met à discuter. Il me conseille d'enlever mon t-shirt détrempé pour me réchauffer et me prête son blouson. Je suis ses conseils, son cuir est pesant sur la peau nue. Il met un peu de musique douce, et peu à peu je me sens à l'aise. Du coup, je lui raconte toute mon histoire. Il m'écoute avec empathie, il me sourit, me relance, insulte avec moi l'autre connard. Il est cool, j'aimerais qu'on roule des heures ainsi. "Et c'est là que tu es arrivé", j'ai fini mon récit. Un long moment de silence. J'espère maintenant que le mec va continuer à m'aider, proposer de m'héberger… J'attends un peu nerveusement, il semble hésiter. "Et tu comptes faire quoi maintenant ?" il me sort. Ça y est voilà la perche. Je la saisis "Tu pourrais pas m'aider ...