Prémonitions
Datte: 06/10/2020,
Catégories:
nonéro,
fantastiqu,
Auteur: Radagast, Source: Revebebe
... brume est là. Un corbeau croasse dans un arbre. Lentement, j’avance jusqu’au perron. Je fais craquer les feuilles gelées sous mes pas. Des arbustes poussent dans les interstices des marches.
Avec difficulté, je pousse la porte d’entrée, aux vitres cassées. Des oiseaux ont édifié leur nid dans le hall. Des toiles d’araignées festonnent les murs et le plafond. Quelques rongeurs fuient ma présence. L’escalier monumental se dresse devant moi ; je suis irrésistiblement attiré par lui. Un lustre se détache et me tombe sur la tête, je sombre dans l’inconscience.
—ooOoo—
Il fait nuit ; des chandelles sont allumées dans le hall. Un homme monte lentement l’escalier, vêtu d’une veste de chasse et d’un pantalon « tuyau de poêle ». Noir de poils, une grosse moustache barre son visage, des rouflaquettes durcissent ses traits, grossiers. Lourd et massif. Il peut avoir quarante ans.
Il entre dans la pièce chichement éclairée par un feu dans une cheminée.
S’y trouve un couple. Un jeune homme en chemise et pantalon blancs. Glabre, les cheveux châtain, presque blonds, les yeux bleus, svelte. Il tient délicatement les mains d’une jeune femme.
Une jeune femme ; que dis-je : une princesse ! Une beauté noire aux traits hiératiques, peut-être une Peul. Les traits fins et délicats, les lèvres pleines, la chevelure faite d’une multitude de petites tresses tombant de chaque côté du visage. Elle me fait penser à une reine d’Égypte, Néfertari, dont j’ai vu la statue au Louvre. Une ...
... Néfertari noire d’ébène, vêtue d’une longue robe blanche qui dessine sa haute silhouette fine.
Elle regarde le jeune homme avec dévotion, un amour éperdu. Et ce regard, mon Dieu, ces yeux ! Grands, immenses…
Ce regard, je le connais : c’est celui de mon rêve.
— Je le savais ! hurle l’homme, je le savais !
Le quadragénaire avance d’un pas et gifle violemment la jeune femme. Sa lèvre éclate sous l’impact ; elle tombe lourdement sur le tapis.
— Traînée, catin, sale négresse !
Le jeune homme se jette sur l’intrus ; un combat farouche s’engage. Son adversaire a l’avantage du poids, lui de l’agilité et de la jeunesse. Il arrive à le frapper au foie. Le gros homme se plie en deux ; il le frappe au menton, allongeant son adversaire pour le compte. Il se précipite auprès de la jeune femme, lui caresse le visage, l’aide à se relever.
— Viens vite, fuyons !
Elle se dirige vivement vers un meuble, y prend une petite chose emmaillotée. De petits cris s’échappent du paquet de linge. Elle le tient contre son sein.
Son compagnon l’entraîne par la main dans l’escalier. Lorsqu’ils arrivent à la porte du perron, un coup de feu retentit. Sur la plus haute marche se tient le gros homme, un pistolet à la main.
En bas, le jeune homme pousse un cri, vacille et s’écroule.
— Nooon ! hurle la jeune femme, qui s’agenouille auprès de lui.
— Tu croyais que j’allais vous laisser partir ainsi ?
De nouveau il la gifle violemment. Elle s’effondre, inanimée.
Il transporte les ...