1. Contagion


    Datte: 31/07/2020, Catégories: voyage, photofilm, nonéro, Auteur: HugoH, Source: Revebebe

    ... politiques qu’il faisait, il en avait bien conscience, pourtant, quand son bras armait, quand il s’apprêtait à donner le baiser au temps / à baiser le temps, un vide s’intercalait entre son esprit et la cible. Il ne ressentait plus rien, disparaissait derrière l’outil. C’était l’instinct qui commandait. Les gens pensaient, pour le peu qu’il discutait avec eux, que les notions de bien et de mal guidaient son travail. De la merde, oui. Juste l’instinct. Ça sonne / ça ne sonne pas. Bonne lumière / Mauvaise lumière. Froideur blanche / Chaleur noire. Son bras ajustait, sa main armait, son œil visait.
    
    C’était un chasseur qui vendait au plus offrant. Mais à vrai dire, l’argent n’intéressait que peu Elias. Il s’agissait de remplir les trous. Il avait des enfants, des ex-femmes. Des pensions à payer, des notes à régler. Mais ce n’était pas sa vie. Son existence consistait à prendre des avions, des bateaux, des hélicoptères, des pirogues, des voitures, des motos. Tout ce qui bouge / Tout ce qui avance. Sans ce mouvement, il deviendrait fou.
    
    Dormir dans la nature ne lui déplaisait vraiment pas, à même le sol, sous des toiles de fortune. Les hôtels l’embarrassaient. Les douches l’ennuyaient. Il aimait rentrer sale de ses bivouacs et poser les pellicules chargées sur la table. Dérouler lui-même ses films. Quand il revenait en ville, il se rendait dans des bureaux au cœur du quartier d’affaires, pile poil. Signait des papiers, faisait glisser les clichés sur des bureaux lustrés, ...
    ... regardait les nuages sombres s’agglutiner près des fenêtres. Il avait un appartement. Vide. Juste un sofa et un frigo. Mais il n’y dormait pas. N’y passait même plus. Il se demandait quelquefois si quelque chose quelque part avait encore de l’importance.
    
    L’hélicoptère ajusta sa verticale. Les pilotes s’agitaient. Elias gueula, Mais vous êtes des novices ou quoi ? Putain, la carte elle est claire non ? Puis vers le guide, C’est quoi ces amateurs de merde ?
    
    L’hélicoptère piqua légèrement du nez puis les pâles reprirent de la puissance, ils allaient vers le sud. Le guide le regarda salement, On y est presque Lemdao.
    
    D’un coup, une trouée dévora le crâne des arbres. Le soleil fit briller l’eau du fleuve et Elias les aperçut. Des petites habitations. Des huttes. L’hélicoptère tournoya un moment autour de la zone jusqu’à ce qu’un indigène totalement nu pénètre dans la clairière. Pointe du doigt la chose volante. Puis dans son sillage, un autre et encore un et encore un. Ils furent bientôt une cinquantaine, les yeux immenses dévorant le ciel. Certains arboraient des peintures. D’autres non.
    
    C’est bon ça, grimaça Elias. Depuis qu’il était au Brésil, rien, absolument rien à se mettre sous la dent. Il s’était dit, Pays dangereux. Croissance à deux chiffres. Inégalités lourdes. Son instinct soufflait, Il y a de bonnes photos à prendre. Son instinct soufflait, Reste encore un peu. Mais à part se taper des putes et se réveiller le lendemain en priant le ciel pour que le souvenir ...