1. L'amour du risque


    Datte: 29/07/2020, Catégories: fh, nonéro, Auteur: Sofie, Source: Revebebe

    ... Nous restons ainsi dans le silence, sans nous regarder, jusqu’à ce qu’il lève la tête. À ce moment-là, nos regards se croisent. Stéphane tente de prononcer quelque chose, mais je le coupe avant qu’il puisse commencer.
    
    — Alors tu as le SIDA ? Enfin, je veux dire c’est vrai… Heu, je veux dire… Enfin, excuse-moi.
    — Oui, c’est vrai. Voilà le pourquoi de tout cela. Tout se passait si bien, alors j’avais peur de te le dire. Peur que tout s’arrête, entre nous…
    — Mais pourquoi tu ne l’as pas dit plus tôt !
    
    Mes mots partent plus vite que ma pensée, toujours surprise de ce qui se passe.
    
    — Bonjour, je m’appelle Stéphane et je suis séropositif !
    
    Il dit sa réplique avec un sourire d’une tristesse éclatante.
    
    — J’suis trop conne. Moi qui croyais que…
    
    Gênée, je n’ose le regarder en face.
    
    — Arrête, tu ne pouvais pas savoir. Mais à chaque fois que je l’ai dit, comme par hasard, la fille disparaissait de ma vie. Alors là, je voulais avoir une relation plus durable, c’est tout.
    
    Je l’écoute ne sachant quoi répondre. Stéphane a le SIDA. Tout se bouscule dans mon esprit. Plein de détails refont surface. Comme le jour où après s’être coupé en ramassant les débris du verre que j’ai lâché, il s’est mis en colère et m’a chassée de la cuisine. Et sa manie de regarder la montre et de s’absenter quelques minutes dans la salle de bains. Sans doute pour prendre son traitement à heure régulière. Me voici bien bête avec ma scène. Stéphane se lève et l’air désabusé me dit :
    
    — Tu ...
    ... sais tu peux t’en aller dès maintenant. Je comprendrais. Tu ne seras pas la première…
    
    A ce moment, tout tourne autour de moi. Stéphane celui qui me rend heureuse depuis quatre mois est devant moi. Il est en pleine détresse et moi en plein désarroi. M’en aller ? Non, bien sûr que non. Il a besoin de moi et moi j’avoue avoir besoin de lui…
    
    Je bondis, je suis devant lui. Je le regarde et sans hésitation je le gifle. Sa joue marque de suite.
    
    — Ne dis plus jamais ça. Je t’aime…
    
    Je l’embrasse, nos lèvres sont posées l’une contre l’autre. Mais lui ne m’embrasse pas.
    
    — Tu sais vraiment ce que cela implique de m’aimer comme tu dis.
    — Non, sûrement pas. Mais tu m’apprendras. Puis, les quatre premiers mois n’étaient pas si durs.
    — Mais les quatre derniers le seront plus…
    
    Les mots de Stéphane tombent comme une sentence, le choc est lourd. Un de plus.
    
    — J’ai besoin de prendre l’air. Pardonne-moi. Je…J’te promets que je reviens, dis-je en m’éloignant de lui.
    
    Je recule et sors de la pièce pour aller dans le couloir, je prends mon manteau et quitte l’appartement. Sans aucun artifice, aucune mise en scène. Je referme la porte derrière moi et m’appuie dessus. J’ai l’impression d’être vidée, usée, une chape de plomb sur ma tête. Je ne sais que faire, j’ai vraiment besoin de prendre l’air. Je descends l’escalier. D’abord marche par marche, doucement, en m’agrippant à la rampe, puis peu à peu les marches défilent plus vite, beaucoup plus vite jusqu’à descendre à toute ...
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