Belladone, aux vénéneuses séductions !
Datte: 21/07/2020,
Catégories:
fh,
ff,
prost,
caférestau,
Voyeur / Exhib / Nudisme
odeurs,
Oral
69,
mélo,
portrait,
policier,
bourge,
Auteur: Asymptote, Source: Revebebe
... Non, ça ira…
— Hé, vous allez me faire peur à me scruter comme ça ; vous n’allez quand même pas me jeter à la baille ? Allez, puisque tu as l’air d’apprécier ma poésie, en voilà une autre, à l’état d’ébauche mais qui devrait davantage t’intéresser. Le titre en seraLe flic et la fille, ou encoreLa poule et le poulet ; mais en dépit de celui-ci, ce n’est pas du La Fontaine.
Lescroq happe son bras mais, plus insaisissable qu’une anguille, elle se dégage et s’enfuit en psalmodiant à tue-tête les deux vers de la chute.
Le commissaire a l’impression que ses facultés mentales s’enrayent et que son cerveau s’engourdit alors que pourtant des torrents d’images l’assaillent. Il commande un dernier kirsch tandis que dans l’ombre qui se développe il perçoit distinctement l’œil brillant d’Adèle qui le fixe, obstinément. L’a-t-il adorée, cette petite ! Oui, il ne concevait point, à l’époque, la vie sans elle. Il y eut cette soirée de janvier où sur une place de Belfort il la reconnut, accrochée au cou d’un zouave, multipliant des bisous enfiévrés puis s’éloignant avec lui, bras dessus, bras dessous pour s’engouffrer dans un hôtel minable dont il ne la vit pas ressortir. Le traumatisme fut à la hauteur des illusions échafaudées à son sujet. Dès le lendemain, il agréa une proposition de poste à Alger, et trois jours plus tard, ayant liquidé ses affaires à Belfort, il partit sans avoir revu la traîtresse.
Il passa seize ans là-bas, le cœur torturé par son souvenir.
Un soir, à ...
... la terrasse bondée d’un café, un zouave sollicita la permission de s’installer à sa table. Malgré les préventions toutes particulières qu’il nourrissait contre ce corps de l’armée, il acquiesça d’un geste vague de la main. L’homme, sympathique en dépit de son uniforme, se montra d’humeur volubile. Peu à peu la discussion s’enfiévra et bientôt s’égara en confidences. Apprenant qu’il venait de Belfort, l’homme lui déclara :
— J’ai de la famille à Belfort. Je m’y suis rendu pour la dernière fois le 5 janvier 1895, le jour de la dégradation de Dreyfus, une date que nous autres, militaires, ne sommes nullement près d’oublier. J’y ai rencontré ma cousine en fin d’après-midi, une sacrée belle fille qui a dîné avec moi à l’hôtel. Cousine ou pas, j’aurais volontiers satisfait mes penchants libidineux en sa compagnie, mais mademoiselle jouait les fiancées et elle a manqué me gifler quand je lui ai seulement suggéré de monter dans ma chambre. Depuis, je n’ai eu aucune nouvelle.
— Et comment s’appelait votre cousine ?
— Adèle Geistel.
— …
Il demanda dès lors son retour en métropole où il tenta de la retrouver. Toutefois, la notification de son décès mit rapidement un terme à ses recherches.
Maintenant, toutes ces scènes se mélangent dans sa tête, entremêlent ses désarrois présents et passés. Et toujours l’œil offusqué d’Adèle flamboie, accablant de reproches. Va-t-il comme autrefois céder à d’outrancières indignations et laisser une seconde méprise gouverner son existence ? ...