Entretien avec un esprit - Histoires de Sexe

Entretien avec un esprit

... son visage affiche une expression de stupéfaction à laquelle se mêlent l’angoisse, la vraie, celle qui vous retourne les viscères. Elle ouvre la bouche, péniblement, plusieurs fois, avant de parvenir à marmonner d’une voix sans force :

— Pourquoi tu dis ça ? Je t’ai pas…

Le verre virevolte alors qu’aucun de nos doigts ne le touche et s’arrête brusquement.

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Pauline se lève. Sa chaise se renverse. Ses yeux ont quelque chose qui ne tourne pas rond, quelque chose qui ne colle pas avec la fille qui est à mes côtés en cours d’Histoire de l’art.

Je réfléchis, essayant de trouver ce qui a changé dans son regard…

Ses yeux ne sont plus bleus, mais noirs, pupilles dilatées à l’extrême.

Pauline incline la tête sur le côté et commence à parler avec une voix qui n’est pas la sienne, une voix de petite fille :

— Tu m’as laissée crever alors que je me noyais, Mélanie, déclame Pauline avec cette étrange voix de fillette. Tu ne voyais pas que j’agitais ma petite main ? Bien sûr que si ! Mais tu as préféré me laisser couler ! Tu n’as même pas essayé de me tirer de là ! Tu t’es contentée de me regarder sombrer dans les eaux !
— Arrête, s’il te plaît. Tu sais que c’est pas vrai. Je t’ai pas aidée parce que je pouvais pas. Je savais pas nager à l’époque. Qu’est-ce que j’aurais pu faire ?
— Tu aurais au moins pu…
— NE L’ÉCOUTE PAS, MÉL, beugle Frank. Cet esprit joue avec toi : c’est une de leurs particularités, se jouer de nous. Ils aiment semer la discorde et le ...

... doute entre les humains. Ils…

Je n’en crois pas mes oreilles… Il serait devenu expert en démonologie et spiritisme en l’espace d’une soirée ? Cependant, la chose qui parle à travers Pauline lui coupe la parole :

— Écoutez-moi ce fils de fiotte, s’exclame ma copinemétalleuse avec cette voix d’enfant. Comment va ton père, Frank ? demande Pauline en fixant Frank avec des yeux emplis de malignité et de vice.

Son regard est si terrifiant qu’il ferait détaler un légionnaire. Frank ne répond rien et demeure silencieux jusqu’à ce que Pauline enchaîne avec une nouvelle question :

— Tu lui en as parlé, à ton pote Jérôme, de ta découverte ?
— Mais qu’est-ce que tu racontes ? Je vois pas de quoi tu veux parler.

Depuis le début de leur échange verbal, j’observe Frank dont le visage a blêmi une première fois au moment où l’esprit l’a traité defils de fiotte, et une autre fois lorsque lachose qui se sert de Pauline pour s’adresser à mon ami a mentionné unedécouverte

— Tu sais très bien de quoi je parle, mon petit Frankie, glousse Pauline avec sa voix de fillette.

Les joues de Frank sont rouge brique ; plus rouges et elles auraient pris feu. Son regard exprime la colère, la haine, la rage et de nombreuses autres émotions négatives, destructrices. Je sens qu’il est sur le point de rentrer dans le lard de Pauline. Et cette dernière n’est pas bien épaisse alors que Frank a des années de rugby derrière lui et risquerait de la pulvériser.

— Frank, ressaisis-toi. Cool, OK ? ...