L'ultime cadeau
Datte: 11/05/2020,
Catégories:
fh,
fhh,
hplusag,
extracon,
campagne,
anniversai,
amour,
nonéro,
Auteur: Musea, Source: Revebebe
Paris, rue Washington, le 12 mai 2028, 15h52
La vie était décidément une chose compliquée. Alors qu’on s’ingéniait à la rendre simple, elle se faisait rebelle, obscure, déroutante, violente et incroyable. Voilà ce que pensait Catherine en raccrochant le combiné du téléphone et en sortant péniblement sa valise du grand dressing de son appartement parisien.
La Camarde venait de lui voler l’homme de sa vie. Celui dont elle croyait encore à l’immortalité. Un chêne, un de ceux qui pouvaient supporter toutes les tempêtes, tous les drames, toutes les déceptions. Et elle en avait été longtemps une de taille pour lui. Pas d’enfants, pas d’attaches sérieuses hormis son travail et son logis.
Enfin si, presque. Quelqu’un qui venait la retrouver dès qu’elle avait un coup de cafard, quelqu’un avec qui elle partait régulièrement en vacances. Depuis des années. Ils venaient même de se décider enfin à emménager ensemble : Catherine s’apprêtait à l’annoncer publiquement.
L’infarctus massif paternel l’en avait empêchée. Et maintenant… Catherine se sentait aussi désespérée que lorsque, il y a des années, elle n’arrivait pas à rattraper son petit frère à vélo sur la route d’Ambert. L’envie de pleurer l’assaillait à chaque minute, la même impression d’inutile et de futilité étreignait sa poitrine.
C’est Sylvie qui l’avait prévenue. Sylvie, la dernière compagne de son père. Plus âgée de cinq ans mais plus solide finalement que l’homme dont elle partageait officiellement l’existence ...
... depuis près de trente ans. Elle avait l’air abasourdie, l’air de quelqu’un qui ne croit pas à ce qu’elle dit : « Un zombie », a tout de suite pensé Catherine. « Un zombie qui se sentirait de trop. »
Sylvie avait prévenu aussi Jean-Marc, le frère de Catherine. Ils se retrouveraient tous à Issoire à la fin de la semaine pour l’enterrement. Leur père avait laissé des instructions. Mais, avant de partir pour l’Auvergne, elle devait aller chercher un paquet à son nom, déposé dans un coffre de banque par le défunt.
— Une lubie, avait répondu Sylvie au téléphone, quand Catherine l’avait interrogée. Ton père voulait absolument te léguer un vieux recueil de nouvelles qu’il écrivait depuis des années. Il disait que toi seule pourrait arriver à comprendre ce qu’il racontait.
Catherine avait souri malgré les larmes. C’était bien de lui ce genre de blagues. Tout à fait lui, même. Dans les pires moments, il trouvait toujours le moyen de plaisanter. Mais s’il avait cru bon de déposer ça dans sa banque à elle, c’était important, grave peut-être. Fébrilement, elle enfila sa veste et jeta un œil à la pendule du salon. Mr Fontenoy lui avait dit d’arriver à 16 h 30. Il était plus que temps de partir.
Pau, le matin du même jour, galerie du Vert Galant aux environs de 10h.
Il faisait beau ce matin-là : un léger vent agitait les branches des marronniers de la place de la Monnaie. Et le ciel bleu jouait sur les cîmes du Pic du Midi d’Ossau. Temps de printemps heureux, plein jusqu’au ...