La « Lancenoir » (11)
Datte: 28/04/2020,
Catégories:
Trash,
Auteur: Victor_lepieux, Source: Xstory
... vers le couple. L’homme était habillé élégamment, façon Ralph Laurens. Il avait un peu plus de quarante ans et devait être un cadre. Sa femme faisait dix ans de moins que lui. Elle portait un sac de chez Dior. En comparaison, Amadou en jean troué et en marcel semblait sortir d’une autre dimension. Amadou s’approcha d’eux, Léa sur ses talons. Lorsqu’il ne fut plus qu’à une dizaine de mètres, il les héla :
— Hé !
Le couple se retourna un instant, avant de reprendre leur route. Il leur semblait incongru que ce noir mal habillé puisse les apostropher. Il devait sans doute appeler un de ces camarades plus loin.
— Hé, j’vous cause.
Cette fois-ci, ils hésitèrent, la rue n’était pas tout à fait déserte, mais il était évident qu’il ne pouvait s’adresser qu’à eux. Le mari cessa de marcher pour se retourner. Il camoufla rapidement une moue de dégoût face à ce quidam aussi peu distingué qui lui faisait perdre son précieux temps.
— Oui ?
— C’est pas à toi que je cause, mais à la gonzesse.
— La "gonzesse," c’est ma femme. Alors tu ferais mieux d’aller voir ailleurs.
En disant ça, il regarda Amadou droit dans les yeux, sûr de l’impressionner. Bertrand était un cadre haut placé dans une multinationale prestigieuse et il était bourré de fric au point de ne savoir qu’en faire. Quant à la "gonzesse" qu’il avait épousée, elle venait d’une famille de responsable politique respectable, et elle était d’une beauté qui rendait tous ses collègues jaloux. Alors ce n’était pas ...
... un lycéen ayant à peine de quoi se payer un McDo qui allait lui faire peur.
Les deux regards se rencontrèrent.
Amadou n’avait peut-être pas la réussite professionnelle de l’autre blanc-bec, mais son regard était celui d’un fauve. Quand il braquait les yeux sur quelqu’un, l’autre se sentait pris dans les griffes d’un prédateur sanguinaire. Ses pupilles étaient d’un noir intense, il épouvantait et faisait naître le respect.
Le cadre planta son regard dans les yeux du noir. Après dix secondes, ses genoux se mirent à trembler. Malgré l’inconfort de cette situation, il ne voulait pas être le premier à rompre le contact oculaire. Au bout de vingt secondes, il était pris de sueurs et sa peau pâlissait. À trente secondes, son estomac se mit à se contracter et il eut une soudaine envie de chier dans son froc. Il baissa les yeux, il ne sentait plus ses jambes et avait peur de s’écrouler par terre.
Profitant de l’immobilité du cadre, Amadou s’approcha de la femme comme si elle lui appartenait :
— Toi, comment tu t’appelles ?
— M-moi ? C’est euh... Églantine.
— Églantine... C’est pour ça que... t’as épousé un gland ?
Amadou jeta un regard sévère sur Léa, qui se mit à glousser d’un rire un peu forcé de la blague de son maître. Le mari, lui, ne riait pas :
— Je ne vous permets pas d’insulter ma femme !
— C’est toi que j’insulte ducon, et je me fous de ta permission.
— Mais je... je ne vous permets pas... vous n’avez pas le droit de... de...
— De discuter ...