1. Diogène versus Socrate


    Datte: 12/04/2020, Catégories: nonero, historique, délire, Humour Auteur: Brodsky, Source: Revebebe

    ... Athènes à Sparte, la Grèce au reste du monde, les hommes aux femmes, et les jeunes garçons aux autres hommes.
    — Ainsi tu prétends que tout se vaut. Il n’y aurait pas de différences fondamentales, si l’on t’en croit, entre un cafard et un Athénien ?
    — Le cafard occupe sa fonction au sein de notre univers. Par exemple, il mange des ordures. Et il est identique à l’homme, puisque si j’en crois certains citoyens d’ici, il habite avec sa famille dans la même maison que toi.
    — Les Athéniens apprécieront sans doute tes propos comme il se doit.
    — Espérons qu’ils ne portent pas sur mes propos le même jugement que sur les tiens. J’ai cru comprendre qu’un procès aurait lieu bientôt.
    — Un procès au cours duquel je deviendrai immortel pour les générations futures.
    — Eh bien moi, je préfère être vivant ici et maintenant, ne m’en veux pas.
    — Ainsi tu ne défendrais pas tes idées devant un tribunal, tu refuserais de mourir pour elles…
    — Mourir pour des idées ? D’accord, mais de mort lente !
    — Tu me répugnes, Diogène ! Tu préfères provoquer les gens ou les faire rire par tes pitreries, mais que leur apportes-tu d’autre que tes pitoyables réparties ?
    — Le rire, Socrate.
    — Et pour cela, tu es prêt à tout !
    — Le rire, ...
    ... l’irrévérence, l’insoumission, la liberté…
    — Le doute éternel, l’inconfort, la précarité !
    — C’est le lot commun des mortels.
    — Eh bien moi, je veux dépasser cela.
    — Vas-y, je t’en prie…
    — Et je veux que ceux qui en sont capables puissent également le dépasser.
    — Tu veux être un exemple ?
    — Oui.
    — Et que tes disciples le soient ?
    — Parfaitement !
    — Alors dis-leur de bien se protéger. Enseigner la sagesse, c’est faire la guerre aux sots. N’oublie pas de mettre un casque. Durant toute ta vie, tu as voulu être un exemple, être reconnu. Sois sans crainte Socrate, tu le seras. Ton disciple Platon a la plume habile, il saura t’ériger une statue digne de toi.
    — Et qui érigera la tienne Diogène ?
    — Qu’est-ce que j’en ai à foutre ? Je vis ma vie d’homme libre, et cela suffit bien largement. Cela dit… je vais quand même répondre plus clairement à ta question. Moi aussi, j’ai rendu visite l’autre soir à La Calamiteuse Pythie. Et je sais, par elle, qu’un jour quelqu’un essaiera de me rendre justice.
    — Qui donc ? Il n’y a que les chiens au milieu desquels tu vis qui semblent capables de te supporter.
    — Eh bien sûrement fera-t-il partie de cette meute, alors.
    — Son nom Diogène, son nom !
    — Un certain Brodsky. 
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