1. Sophyann et le mythe de la dame à la licorne (2)


    Datte: 22/03/2020, Catégories: Hétéro Auteur: Bugsy, Source: Xstory

    Sautant fossés et ornières, se jouant des arbres jetés à terre par la dernière tempête, elle galopait fièrement, faisant résonner le sous-bois de ses sabots agiles. Elle était majestueuse, toute blanche, déployant avec grâce ses longues foulées, ses yeux d’un bleu vif repérant aussitôt le meilleur chemin tandis que sa longue corne, pointée vers l’avant, semblait aussi bien indiquer le meilleur des chemins que défier d’éventuels concurrents. Sous la robe blanche et légèrement brillante d’écume, on pouvait voir le jeu de tous ses muscles qui n’avaient qu’un seul but : la recherche de la vitesse alliée à la beauté absolue.
    
    Derrière elle, moins agile, moins ailé et de plus ralenti par le poids de sa cavalière, l’étalon avait du mal à la suivre. Il y mettait pourtant du sien, anticipant les ordres, calculant lui-même la meilleure trajectoire, le point précis d’où il devait s’élancer pour survoler l’obstacle, mais il n’y avait absolument rien à faire : la somptueuse licorne était plus rapide que lui. Toujours désireuse de l’entraîner dans cette course folle, quand elle sentait que les foulées qui les séparaient augmentaient, elle s’arrêtait, pliait gracieusement l’encolure pour regarder derrière elle, hennissait légèrement comme pour lui dire d’aller plus vite, puis elle repartait de plus belle lorsqu’elle sentait sur sa croupe le souffle puissant des naseaux de l’étalon.
    
    Aussi noire qu’elle était blanche, la robe de l’étalon luisait elle aussi, ses yeux comme fous ...
    ... semblaient jeter des éclairs et il continuait sans cesse, encouragé par sa cavalière, sa folle poursuite de la belle licorne.
    
    Haletante, les cheveux au vent, le visage rougi par la rapidité de la course, Sophie était heureuse, plus heureuse que jamais elle ne l’avait été. Sa rencontre avec cette belle licorne, il y a quelques semaines, dans cette petite clairière au cœur de la forêt était un des plus beaux jours de sa vie, et depuis elle vivait un rêve éveillé, se laissant emporter par cette majestueuse chimère qui lui faisait découvrir presque tous les jours les endroits les plus profonds et les plus mystérieux de sa chère forêt, des endroits que seule elle n’aurait jamais osé explorer.
    
    Et elle se laissait ce jour emporter dans ce qui serait, peut-être, une de ses dernières chevauchées.
    
    Oui, peut-être une de ses dernières, car en ce beau jour du printemps naissant, Yann devait rentrer de la guerre...
    
    Dans toutes les lettres qu’elle lui avait envoyées, jamais elle n’avait osé lui parler de la licorne. Non pas avec l’idée de lui cacher quelque chose, mais simplement parce qu’elle ne savait pas comment lui présenter la chose, ayant beaucoup de mal à décrire ce qui lui arrivait et toute la splendeur de sa rencontre. Et puis, c’est vrai, elle redoutait aussi un peu la réaction de son fiancé lorsqu’il serait au courant de ses folles chevauchées. Mais elle était si heureuse !
    
    Et elle savait que la seule ambition de Yann était qu’elle soit la plus heureuse des jeunes ...
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