1. Le messager


    Datte: 26/02/2020, Catégories: bizarre, nonéro, sf, historiqu, Auteur: Brodsky, Source: Revebebe

    J’approchais du bord du lac lorsque je les vis débarquer le poisson qu’ils venaient de pêcher. L’un d’eux, un grand barbu qui devait être leur patron, me dévisagea longuement.
    
    — Suis-moi, lui dis-je.
    
    Il me suivit, ainsi que son frère.
    
    Nous avons marché longtemps. Puis le barbu me dit :
    
    — J’ai faim.
    
    Alors nous nous arrêtâmes pour manger. Ils firent griller du poisson qu’ils avaient emporté et sortirent une miche de pain de leur sac.
    
    — Tu en veux ?
    
    Je souris… Je n’avais pas mangé depuis plusieurs siècles et j’ignorais jusqu’au goût de ce qu’il m’offrait. Je fis signe que non.
    
    — Tu ne manges pas ? demanda-t-il.
    — L’Homme ne vit pas seulement de pain…
    — Ah… Tu veux du poisson ?
    
    Toute notre amitié serait parsemée de ce genre de quiproquo. Il était un peu bouché, le barbu. Mais il était bon, et généreux. Je l’aimais bien. Il s’appelait Simon…
    
    Mon histoire, vous la connaissez. Inutile que je la raconte à nouveau, même si ce qu’on vous a enseigné est assez loin de la réalité. Par exemple, lorsqu’ils m’ont amené cet aveugle pour que je le guérisse… J’ai posé mes mains sur ses yeux comme le Père me l’avait appris. Ils ont alors tous crié au miracle. Mais ça n’avait rien d’un miracle… C’est comme cela que j’avais appris à guérir…
    
    De la même manière, ils n’ont cessé de faire la confusion entre le Père et le Dieu auquel ils croyaient tous. Ils n’avaient pas tout à fait tort, mais en même temps, ils étaient si loin de la réalité…
    
    — Tu es le fils de ...
    ... Dieu !
    
    Pouvais-je leur dire la vérité sans les effrayer plus qu’ils ne l’étaient déjà ? Ils avaient pris une des femmes qui nous suivait pour ma mère. Ils prétendaient qu’elle n’avait jamais connu d’homme et que, par conséquent, il s’agissait là d’un autre miracle. Je laissai dire… La réalité aurait été plus incroyable encore à leurs yeux.
    
    _____________________
    
    Je m’étais réveillé en plein désert. Puis, pendant deux jours, j’avais marché plein nord. Il fallait que je me réhabitue à mon corps, que je réapprenne à marcher, que je sente la chaleur du jour, le froid de la nuit, que je reprenne conscience de ce monde, que je voie quels oiseaux volaient dans le ciel, quels animaux peuplaient le désert. Il fallait également que je réapprenne la place des étoiles dans le ciel. Durant ces deux jours, je me remémorai ma vie passée, ce qui m’avait amené jusqu’ici…
    
    La tribu… Une semaine de chasse loin des grottes. Nous ramenions du gibier en abondance lorsque soudain le chef poussa un grognement inhabituel. Là-haut, venant du ciel, un énorme caillou semblait tomber vers nous. Il brillait de mille feux… Je le fixai longuement, jusqu’à ce que, presque arrivé sur le sol, il freine sa descente. Ce n’était pas un caillou, bien sûr. Il se posa lentement. Je cherchai mes compagnons du regard ; ils s’étaient tous enfuis. Sans comprendre pourquoi, je n’avais pas peur. Au contraire, je me sentais attiré par cet objet volant dont semblaient émaner des ondes de bien-être et de paix.
    
    Et ...
«123»