1. Le tournage est dans trois heures


    Datte: 24/02/2020, Catégories: fh, cinéma, contrainte, Humour Auteur: Samuel, Source: Revebebe

    Elle se dégagea des draps poisseux ; il la détaillait et réfléchissait à la meilleure façon de poser la question fatale :
    
    Enfin il se décida pour la formulation suivante :
    
    — Toi, au lit, il ne faut pas t’en raconter !
    
    Elle le regarda d’un air un peu navré tout en s’essuyant l’entrejambe.
    
    — Enfin, je veux dire, au lit, tu tiens tes promesses.
    — Moi ?
    — Oui, toi, bien sûr. Au lit, tu es une vraie…
    — Attention à ce que tu vas dire !
    — Une vraie diablesse. Mais, en même temps, tu as ce regard triste et langoureux, cette expression mélancolique. Pourquoi ?
    
    Elle s’habilla d’une serviette de bain aux couleurs chatoyantes et elle esquissa un vague sourire.
    
    — Tu sais bien. Nous, si on veut réussir, il faut coucher. Alors on couche. Mais, vu le contexte, ce n’est jamais de gaieté de cœur, même avec des gens qui nous plaisent. On fait les amoureux extasiés, mais en fait, si je suis dans ton lit, c’est pour avoir le rôle, tu le sais très bien.
    — Il ne faut pas voir les choses comme ça. Bien sûr que j’ai besoin de connaître le potentiel de l’actrice… Il y a tellement d’enjeux dans le cinéma… On ne peut pas prendre des risques avec une fille qui serait rétive… En couchant ensemble, on gagne du temps, tu comprends ? Et au cinéma, plus que partout ailleurs, le temps c’est de l’argent. Et puis, alors, la notion de plaisir ? Hein, la notion de plaisir ? C’est quand même agréable de faire l’amour. Moi, je me dis même qu’il n’y a rien de plus agréable. Surtout avec ...
    ... quelqu’un comme toi, qui laisses tous les préjugés à la porte.
    — Ce n’est pas seulement mes préjugés que je laisse à la porte, c’est aussi ma culotte, ma dignité, et le peu d’estime que j’ai de moi-même.
    
    Il se leva d’un coup et marcha de long en large, dissimulant sa nudité dans le drap qu’il avait enroulé autour de lui.
    
    — Là, tu es en train de me faire un film. La pauvre petite qui voulait un rôle et qui est prête à tout. Mais pense une seconde que si tu n’étais pas bonne…
    — … au lit ?
    — Non, sur le plateau, quand on a fait le casting. Si tu n’étais pas bonne comédienne, chaude au lit ou pas, je ne t’aurais pas prise. Tu es vraiment intéressante dans ton travail. Tu apportes une légèreté, une sorte de naïveté, un côté de toi que j’adore, c’est cette capacité à jouer l’innocence. C’est très rare, tu sais.
    — Oui, c’est ça. Dans le film, je joue une sorte de godiche-potiche, naïve et froide, et si je peux jouer ça, c’est parce que je suis chaude au lit. J’aimerais bien un jour qu’on inverse les rôles : une fille chaude sur le plateau et froide au lit. Comme ça. Pour voir.
    
    Il réagit vivement et fouilla sur le bureau pour trouver les affichettes de ses anciens films.
    
    — Comment ça, une fille chaude sur le plateau ? Moi, je ne fais pas de film porno. Tout mon cinéma est basé justement sur l’absence de relation entre les êtres. Tu as vu mes films précédents : les acteurs se touchent à peine, ne se regardent même pas. On arrive au concept exact de la solitude sur une échelle ...
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