1. Le corbeau et le renard


    Datte: 06/01/2020, Catégories: nonéro, Humour Auteur: Brodsky, Source: Revebebe

    J’aime aller aux chiottes, surtout le matin…
    
    Enfin, au réveil, habituellement sur le coup des onze heures, c’est mon petit matin à moi. Et au réveil, personne n’échappe à la règle des trois C : café, clope, caca. Ce matin-là, les mômes étaient en cours, et côté michetonne, c’était la disette depuis plusieurs semaines. Brenda était partie en claquant la porte et en hurlant qu’elle en avait marre d’entretenir un bon à rien comme moi, qui préférait passer ses nuits à écrire des obscénités plutôt que de la baiser. Elle n’avait pas tort. Son gros cul de baleine espagnole me donnait la nausée, et ses gémissements m’étaient devenus insupportables.
    
    Elle faisait partie de ces presque vieilles qui, sentant arriver la ménopause, se mettaient à avoir au plumard des exigences de jeunes athlètes, sauf que son corps flasque ne donnait plus envie de se lancer dans un match en trois sets gagnants, et que sa chatte était devenue si large à force de se faire tringler qu’on ne savait jamais si on s’y trouvait encore après avoir limé plus de cinq minutes.
    
    Bref, j’étais seul, j’avais la paix, et je décidai après mon café de terminer ma règle des trois C en allumant ma clope, le cul posé sur la cuvette, en prenant bien soin de déposer un cendrier à mes pieds, et sans oublier de prendre un bouquin avec moi afin de prolonger ce merveilleux moment.
    
    Je dois préciser que j’ai installé une étagère dans mes chiottes, avec plein de bouquins à disposition des visiteurs :Lire aux cabinets ...
    ... d’Henry Miller, lesContes fantastiques d’Edgar Poe, toute la saga duTrône de fer, ainsi que quelques magazines de cul subrepticement volés sous le matelas de mes enfants pour les temps comme ceux que j’étais en train de traverser. Voler ce genre de littérature à ses ados plutôt qu’en librairie a ceci de jouissif que personne n’ose vous demander d’où provient le fruit du larcin, hé-hé…
    
    Après un quart d’heure de pure poésie inspirée par le Vieux dégueulasse, je me décide à lever le camp, lorsque je m’aperçois que le rouleau de papier cul est vide et qu’aucun autre n’est à disposition dans la petite armoire qui se trouve derrière moi. Putain de mômes ! Me voilà donc obligé d’entreprendre une expédition jusqu’au placard de la salle de bain et de partir en quête du Saint Rouleau. Je me déplace à petits pas de bagnard, les chevilles entravées par mon jean, et une colère sourde s’emparant de la totalité de mon âme immortelle. Je suis à peu près à mi-chemin lorsqu’on sonne à la porte et que le clebs se met à hurler :
    
    — Wouah wouah wouah !
    — Ta gueule, Néron !
    — Wouah wouah wouah !
    — Putain de chien ! TA GUEULE !
    
    Je fais donc demi-tour direction la porte d’entrée, toujours dans le même état. Arrivé devant la lourde, je crie :
    
    — Ouais ? C’est pour quoi ? TA GUEULE, LE CHIEN !
    — Cabinet Grignon, huissier de justice ; nous venons pour les impayés.
    — Hein ?
    
    Tant pis, je remonte vite fait mon froc et boucle ma ceinture en oubliant de refermer ma braguette. J’ai la chemise ...
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