Jennifer - Histoires de Sexe

Jennifer

... pas. Alors, elle a repoussé ma tête. Sa bouche souriait doucement, mais ses yeux étaient tristes et pleuraient. Par-dessus le ruisseau de mes larmes, elle s’est mise à embrasser mes joues, en me murmurant des mots qui consolent. Elle m’a regardée à nouveau, et comme le chagrin n’avait pas l’air de vouloir partir, elle m’a attirée une nouvelle fois. Là, elle a posé ses lèvres sur les miennes, et m’a fait une bise, longue et très sonore. La surprise m’a arrêtée instantanément. Une bonne seconde a passé avant que je ne me dise :

« Est-ce que toutes les femmes de cette ville vont venir m’embrasser les unes après les autres» ?

Et je l’ai entendue dire :

— Voilà… normalement, ça, ça marche à tous les coups !

Elle me souriait beaucoup plus franchement, maintenant. Elle se retenait carrément de rire, pour être plus précise. Mais on pouvait voir un peu de tristesse résiduelle dans ses yeux.

— Bon. Si tu me disais ce qui te met dans cet état, maintenant, m’a-t-elle demandé, d’une voix où nulle trace de ce qu’il venait de se passer, ne subsistait.

Et en «oubliant» de dire ce qu’on faisait Luc et moi, avant que ça n’arrive, je lui ai tout raconté, à l’intérieur du bar. Ensuite, elle a gardé le silence un moment, je dirais… trente secondes, et elle m’a demandé :

— Dis… Luc et toi, vous êtes ensemble, maintenant ?
— Oui… je crois…
— Comment ça, «je crois»… Vous vous aimez, oui ou non ?
— Ben… oui.
— Donc, vous êtes ensemble ! Et il est au courant de tout ça, je ...

... suppose ?
— Ben, oui, ai-je répété. Il était là…
— Même du baiser et de la gifle ?
— Euh… non… Mais il a dû l’entendre me crier qu’elle m’aimait…
— D’accord… Mais, écoute Jennifer… Florence, tu n’as pas envie de la perdre, n’est-ce pas ? Donc, tu ne dois plus faire de bêtise, comme la frapper… et parce qu’elle t’aime, tu ne devrais pas la perdre.
— Vous croyez ?
— Tututut… tu ne vas pas te mettre à me vouvoyer, alors que Samuel commence tout juste à m’accepter, non, m’a-t-elle grondée gentiment. Oui, je crois… il faut que tu en parles à Luc… voir ce qu’il en pense, lui…
— Ah oui… Au fait, il est là ?
— Non. Il a emmené Raymond à la pêche… Une matinée entre hommes, qu’ils ont dit !
— Ah bon…
— Oui. Ça faisait longtemps qu’ils n’en avaient pas eu… et puisqu’on est débarrassé d’eux, on s’fait une matinée entre femmes ?
— D’accord… mais euh… j’peux prendre une douche d’abord ?
— J’allais justement te le suggérer…

Quand je suis retournée en-bas, après ma douche, une assiette de croissants fumants attendait sur la table. Geneviève aussi m’attendait.

— Tu prends quoi, au p’tit-déj, m’a-t-elle demandé, joyeuse.
— Normalement, café au lait… mais, j’sais pas si j’pourrai avaler quelque chose…
— Ouais, ben moi, comme j’ai horreur de prendre le mien toute seule, je n’allais pas en prendre, ce matin… mais, comme tu es là, tu m’accompagnes ?
— Ok.

J’ai dévoré mes trois croissants… comme elle. Je me sentais heureuse, même si Luc me manquait. Le tourbillon des pensées ...