Quarante textes sur la laideur et autres féroces amusements
Datte: 28/08/2019,
Catégories:
bizarre,
laid(e)s,
collection,
humilié(e),
nonéro,
exercice,
portrait,
Auteur: Raphaël Zacharie de Izarra, Source: Revebebe
... réjouissait du malheur de ses semblables, seule consolation à sa misère. Bref, c’était un monstre de vieille fille.
Notons que sa laideur ne l’empêchait nullement d’éprouver les nécessités de la chair qu’une abstinence prolongée et forcée rendait plus vives encore. Mais tout chez elle était décidément corrompu : ses désirs charnels n’étaient que perversités, honte, bassesses… Ses féminins vertiges consistaient en la perspective de saillies brutales et abjectes, exemptes de toute tendresse.
Elle se mit en tête d’attirer de mâles débauchés avec les seuls artifices à sa portée : la cosmétique bon marché. Elle se farda outrageusement. Loin de masquer sa laideur, ce maquillage eut pour effet de la décupler.
Elle se crut désirable et acheva de se dégrader en s’affublant de noires dentelles et de verts souliers. Ainsi parée, son dessein premier fut de faire des avances au bedeau du village qui outre de n’avoir pas son pareil pour faire sonner l’airain, avait surtout la réputation de manier avec art un certain battant…
Elle frémissait à l’idée d’ajouter un son fêlé au concert de cet expert en cloches.
Avec sa tête affreuse, ses membres osseux, ses côtes apparentes, son corps anguleux, elle ressemblait à une longue araignée attendant sa proie. Dès qu’elle vit l’oiseau sortir de son clocher, elle exerça sur lui ses viles séductions.
Mais le brave bedeau qui n’avait de goût ni pour la chair triste ni pour les créatures contrefaites, encore moins pour les épouvantails ...
... harnachés de broderies, répondit à ses avances par une paire de gifles magistrales, agrémentées d’un crachat bien ajusté entre ses pommettes ingrates.
La gueuse s’en fut, plus fielleuse que jamais, jurant par tous les diables que la prochaine fois elle dissimulerait ses intentions libidineuses derrière le masque permanent et authentique de sa naturelle laideur plutôt que sous celui d’une mensongère beauté.
J’aimais les rires stridents de la méchante fille, et fuyais les sourires onctueux de l’aimable couturière. Il faut dire que la pimbêche était belle comme une catin, alors que la chiffonnière était d’une repoussante banalité. La première était une vraie pie jacassière, la seconde une carpe parfaitement dévote. La chipie avait un cœur venimeux qui était loin de me déplaire, alors que l’ouvrière était d’une honnêteté dégoûtante : un vrai tue l’amour.
Je n’avais de cesse d’admirer la blonde vipère qui s’ébattait joyeusement sous le soleil. Et je maudissais tout haut la terne fileuse chaque fois que je la voyais sortir de son antre. La méchante fille s’amusait parfois à lui cracher au visage. Ce spectacle me réjouissait : c’était la beauté piétinant la laideur. Le triomphe de la joie sur la tristesse.
Le plus comique de l’histoire, c’est que la gueuse avait des vues sur moi. Je lui fis comprendre non sans cruauté que c’était son ennemie, la blonde mijaurée, que je préférais. Je lui expliquai que ses rires aigus, ses éclats de voix fielleux, son front haineux, ses ...