Grande bringue
Datte: 28/06/2025,
Catégories:
fh,
ffh,
freresoeur,
Collègues / Travail
école,
bateau,
amour,
Oral
pénétratio,
Auteur: Roy Suffer, Source: Revebebe
... livrait les épiceries, les crèmeries, les restaurants, les cantines. C’est le premier à avoir eu l’idée de mettre les œufs dans des boîtes ou des plateaux en carton alvéolé, bien mieux que dans des paniers qui se renversaient dans les virages. Parce qu’elle en a fait des kilomètres la dedeuche ! Et même, c’est le premier à avoir pensé à mettre la date sur ses œufs avec un tampon encreur.
Et puis il n’arrivait plus à fournir, alors il a acheté une autre ferme, puis une autre. Il en a eu jusqu’à cinq, où il faisait du lait, de la crème, du beurre, des œufs. Après il s’est mis à vendre les poules, les pondeuses réformées. Il vendait même les plumes comme engrais, une fois broyées. Comme les femmes faisaient de moins en moins de cuisine, la poule au pot n’était plus à la mode. C’est lui le premier qui a eu l’idée de vendre les cuisses toutes seules, les ailerons de poulets, les blancs en tranches minces. Avec le reste, il faisait comme les poissonniers avec la soupe de poisson : le velouté de volaille. Il a gagné des fortunes, mais méritées : un fou de boulot débordant d’idées. Et il faisait travailler jusqu’à deux cents personnes. Mais quand sa femme est morte, c’est comme si le ressort s’était cassé. Les supermarchés grignotaient du terrain, il n’a plus su répondre et trouver des idées neuves. Il a tenté quelques trucs sur la qualité et puis il a fait un AVC. Il s’est retrouvé grabataire en fauteuil roulant. Eh bien, ce sont les filles qui s’en sont occupé jusqu’au bout. ...
... Alors vous pensez, la Françoise, c’est quasiment une sainte… Et elle n’a jamais manqué un cours, sauf le jour de l’enterrement, bien sûr, mais toute la ville y était.
Jérôme fut impressionné par cette description, tant de la fille que du père. C’est sûr qu’avec un père comme ça, les hommes devaient lui sembler bien fades. Dommage, car si ce n’était pas une beauté fracassante, c’était tout de même une très belle femme, très grande, avec des jambes interminables, impression renforcée par ses bottes à talons avec lesquelles elle faisait des pas sonores d’au moins un mètre, reconnaissables entre tous. Un petit nez retroussé, une longue tignasse blonde, parfois tressée, parfois en queue de cheval et souvent libre, de grands yeux bleus candides avec des sourcils en arcs, elle avait cet air sérieux des gens qui ont vécu des choses difficiles. Franche, directe, pointilleuse, elle lui plaisait beaucoup. Inaccessible peut-être, mais il n’avait pas de raison de se passer de ses compétences, il l’inclut dans son équipe de réflexion pour préparer la prochaine rentrée. Quand il exposa ses objectifs, privilégier le raisonné ou le bio, privilégier la qualité au lieu de la quantité, privilégier la vente directe au lieu des centrales d’achat, donner de la valeur ajoutée par la transformation à la ferme, il lut sur les visages l’approbation, le doute et parfois la réprobation. Mais Françoise, qui ne montrait qu’un vague sourire, resta à la fin de la réunion pour lui dire :
— Ce que vous ...