1. Grand magasin


    Datte: 14/10/2024, Catégories: fh, inconnu, magasin, essayage, miroir, québec, rencontre, lieuxpubl, Auteur: Dérivant, Source: Revebebe

    Tu devais te rendre dans la capitale, à Ottawa. Tu ne m’avais pas vraiment dit dans quelles circonstances. Était-ce pour le travail ? Venais-tu faire du tourisme, rencontrer des amis, de la famille ? Je ne l’ai jamais su.
    
    Fidèle à ton habitude, à une formule que tu avais éprouvée dans le passé, tu voulais me donner rendez-vous dans un lieu public. Tu ne voulais pas m’attendre dans un restaurant. Tu voulais un endroit où il me faudrait deviner qui tu es parmi un grand nombre de femmes. Tu jouerais peut-être même avec moi et déciderais de me faire languir ou même, de ne pas te révéler.
    
    Tu m’attendrais donc au troisième étage du grand magasin « La Baie » du centre-ville, dans le rayon de la mode féminine, à midi trente. Tu avais voulu mettre le plus de chances de ton côté. En plein à l’heure du lunch, en semaine, le rayon serait sans doute bondé de femmes, de travailleuses des tours à bureaux des alentours… et de très peu d’hommes. Tu pourrais donc m’identifier facilement et jouer avec moi tant que tu voudras.
    
    Pendant nos mois de correspondance, nous n’avions échangé ni photo ni description physique. Je ne connaissais pas ta voix. Tout ce que j’avais pour te repérer était la description de ta fiche sur le réseau (1,57 m, 57 ans), et la merveilleuse énergie qui se dégageait de tes messages. Je cherchais une sportive coquine, pétillante, rieuse…
    
    Tu ne m’avais rien dit de la suite. Une fois que je t’aurais reconnue, allait-on aller prendre un café chez Starbucks ? Un ...
    ... petit lunch sur une terrasse proche ? Je ne savais pas combien de temps « libre » tu aurais… À vrai dire, tu n’avais rien prévu pour la suite non plus. On se rencontrerait, puis c’est tout.
    
    J’arrive donc à l’heure prévue au troisième étage. Tout de suite, je remarque qu’il y a beaucoup moins de femmes que d’habitude – en raison de la pandémie, les fonctionnaires ne sont toujours pas de retour au bureau. Alors qu’il y aurait pu y avoir facilement plus d’une centaine de clientes dans le rayon un midi d’été, je n’en voyais qu’à peine une quinzaine aujourd’hui, sans doute des touristes pour la plupart. Une seule employée, à la caisse, tout au bout de l’étage. Je me dis que tu as dû être surprise et peut-être même déçue de ce manque d’achalandage. Mais au moins, tu ne t’es pas trompée sur un point : je suis le seul homme sur l’étage, si on excepte le touriste qui semble avoir 80 ans et qui accompagne son épouse dans le rayon des gaines et des soutiens-gorge, en tenant son sac et sa caméra.
    
    Je fais lentement le tour de l’étage. J’élimine mentalement les femmes trop âgées, les presque ados, les femmes qui magasinent à deux (tu ne m’aurais pas fait ça, te présenter avec une amie juste pour m’espionner, puis partir sans dire un mot… mais ça me traverse l’esprit…). Il reste trois femmes. Une femme d’allure sportive, très attirante, mais qui à 1,70 m ne passe tout simplement pas le test. Je me promène lentement près de chacune des deux candidates restantes, qui correspondent toutes ...
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