1. L'art dans la tête


    Datte: 21/06/2019, Catégories: cérébral, exercice, Auteur: Paxal, Source: Revebebe

    — Bien sûr ! me direz-vous. Tu n’as pas eu trop de difficultés ! Tu n’as connu nulle gêne ? Aucun incident de parcours ? Alors pourquoi, pourquoi tant de fierté ? Ce n’est pas un exploit d’y être ! Tout était prêt, tout avait été parfaitement préparé pour ton intrusion !
    
    J’en conviens. J’étais en forme, et cela depuis déjà un bon moment. Évidemment… la belle affaire ! Sinon, je serai resté, ridicule et meurtri, à cogner piteusement aux portes du sanctuaire… et… vous en auriez bien ri ! Mais, détrompez-vous, ce n’est pas de la fierté que vous constatez là ! Non ! C’est de l’arrogance et de l’émerveillement… La manière dont je me transfigure en ces occasions-là me fascine toujours et je dois avouer que j’en tire une félicité certaine. Car, voyez-vous, il ne me faut pas grand-chose, une caresse – et je fus flatté merveilleusement - une image, quelques mots… et me voilà métamorphosé pour l’éternité. Enfin… pour une éternité très relative, ça, malheureusement, vous le savez aussi bien que moi… Mais bon, ne précipitons pas les choses…
    
    L’extraordinaire de cette situation - qui concourt grandement à ma superbe - réside dans le fait que tout, mais vraiment tout, est disponible pour y être : moi, bien entendu - ce qui est des plus trivial à constater, et vous le constatez ! - mais, pas uniquement. Où serais-je si le lieu n’avait pas, lui aussi, pourvu à ma présence ? S’il n’avait pas souhaité ardemment ma venue ? Et là réside, dans cette conjoncture parfaite, tout le mystère et ...
    ... la fascination d’y être.
    
    Une chose est certaine, je le concède, je suis entré avec un peu de… précipitation, vous dites ? Mais l’attente ne le justifiait-elle pas ? Mettez-vous à ma place… heu… je veux dire… comprenez donc que ma patience à des limites et que, d’autre part, ce que vous qualifiez deprécipitation ne signifie nullement, chez moi,empressement : je sais être courtois et élégant, même dans la hâte. J’y suis entré, déterminé, mû par une ardeur impétueuse certes, mais avec grâce et galanterie.
    
    — Alors ? me direz-vous. Et maintenant que tu y es ?
    
    Eh bien, je m’imprègne du lieu, je me balance sagement, je me frotte tranquillement sur les reliefs veloutés, je m’élance gentiment vers les profondeurs de l’abîme.
    
    Bien. Assez de nonchalance ! Esquissons maintenant un geste de retrait… Vous trouvez, sans doute, ce geste un peu théâtral ? Eh bien non ! C’est un geste que l’on peut qualifier de fourbe, d’hypocrite, mais pas de théâtral. C’est vrai… car il n’est pas question que je parte… non ! Dites-vous bien que j’ai mis plusieurs semaines pour me retrouver là ! J’ai souffert le martyr dans ma camisole, bien des jours… bien des nuits… Et même, pour l’anecdote, voilà… un certain temps déjà … j’ai bien cru que c’était acquis, comme aujourd’hui… Enfin y être. En forme depuis un bon moment – et sans aide extérieure d’aucune sorte - tout travaillait en ma faveur, une chaleur lourde et humide, une ambiance discrète, j’avais même eu l’incroyable privilège d’effleurer – à ...
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