1. L'ouverture du bal


    Datte: 26/05/2019, Catégories: nonéro, regrets, Auteur: Lilas, Source: Revebebe

    ... d’elle que possible. Pour qu’elle ait enfin l’impression de respirer. Plus elle le savait proche en ville, plus elle avait du mal à trouver son souffle, et le bien-être qui lui faisait tellement défaut aujourd’hui.
    
    Ce n’était qu’en sachant de nombreux kilomètres la séparant de lui que Liana pouvait se sentir mieux. « Plus que quatre mois », se promit-elle. Quatre mois, et elle déménageait en Bretagne, à Poitiers, n’importe où, du moment que la distance qui l’éloignait delui soit suffisante pour qu’elle puisse respirer en paix.
    
    – Au fait, fit Liana de son air le plus décontracté possible, pourquoi as-tu été à la boîte aux lettres aujourd’hui ?
    
    – J’ai vu une voiture s’arrêter devant chez nous très tôt ce matin, pendant que j’allais aux WC, répondit sa mère en recommençant à couper ses haricots verts sur une planche en bois. J’ai cru voir que quelqu’un mettait quelque chose dans la boîte à lettres, avant de remonter dans sa voiture. Je suis donc allée voir tout à l’heure. Je n’étais pas sûre, tu sais bien que sans mes lunettes…
    
    Liana allait sortir de la cuisine, quand sa mère fut soudain prise d’une inspiration subite.
    
    – Il ne me semble pas avoir reconnu la voiture d’Amélie, ajouta-t-elle avec un coup d’œil perçant.
    
    Liana haussa les épaules.
    
    – Tu sais bien que sans tes lunettes… répéta-t-elle, un brin moqueuse. Bon, je vais me laver.
    
    Liana déposa l’enveloppe sur les marches de l’escalier, la regarda un instant, puis la reprit nerveusement, la retourna, ...
    ... inspecta l’écriture basse et serrée qui désignait son nom. Ce n’était passonécriture. La jeune fille eut un imperceptible soupir de soulagement, et se désintéressa soudain du paquet pour aller prendre une douche.
    
    Il faisait très chaud. Ses cheveux noués en chignon sur la nuque, Liana s’assit sur le petit banc de pierre qui trônait au bout du potager comme un roi devant ses partisans. Il y avait une légère brise, beaucoup de soleil, et pas un nuage en vue.
    
    L’odeur de son parfum récemment appliqué sur sa peau lui vint au nez, et Liana savoura la soudaine sensation qu’elle avait d’elle-même. Ce sentiment était si rare ces derniers temps, qu’elle resta un long moment immobile, se sentant heureuse d’être en vie. On ne pourrait jamais lui ôter ça, ces brefs instants de lucidité où elle prenait conscience d’elle et se sentait certaine d’exister.
    
    Elle chassa ces pensées, et son regard tomba sur l’enveloppe ; avec le coupe-papier qu’elle avait apporté, elle la décacheta à petits gestes sûrs et rapides. Puis elle posa le coupe-papier sur le banc à côté d’elle, prit l’enveloppe à deux mains, et jeta un coup d’œil dans l’ouverture qu’elle venait de faire apparaître. La surprise la paralysa cinq bonnes secondes. Ses lunettes de soleil finirent par glisser sur son nez, et elle les remit en place d’un doigt mécanique, revenant sur terre.
    
    C’était un cahier. Un gros cahier à petit format et grands carreaux, de plus de quatre-vingt dix pages. Elle en reconnaissait un d’autant plus ...
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