La survivante
Datte: 08/05/2019,
Catégories:
fh,
mélo,
sf,
Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe
... agir à sa guise.
L’avoir tiré des griffes de la mort avait créé des liens entre nous à une vitesse incroyable. Je soupçonnais pourtant Eva de forcer son exubérance. Pourquoi ? Pour se sentir plus intensément en vie. Et, peut-être aussi, pour chasser les fantômes qui la hantaient. Plus d’une fois, j’avais surpris sur ses traits le masque amer d’une tristesse infinie. De mon côté, ne flirtais-je pas inconsciemment avec elle pour masquer le malaise que m’inspirait son effrayante maigreur ?
Toujours est-il que j’avais beaucoup de mal à lui laisser faire quoi que ce soit par elle-même, me retenant sans cesse de me précipiter pour l’aider. Eva me paraissait aussi fragile qu’une sculpture de verre. Et j’avais trop besoin de rompre ma terrible solitude pour la laisser se briser.
Cela faisait une semaine à présent qu’elle reprenait des forces. Pourtant, elle me semblait toujours aussi squelettique. Je savais que ce n’étais qu’une impression. Les nutriments hautement caloriques dont je la gavais la remplumaient à vue d’œil. Il lui faudrait cependant plusieurs mois pour retrouver sa silhouette d’antan – fort agréable à regarder, m’avait-elle confié.
Pour l’heure, il était temps de quitter ce bunker nauséabond. Je lui exposai donc mon plan, sachant par avance que cela n’allait pas lui plaire.
— Quoi ! Tu vas…
— Exactement, t’as tout pigé, ma belle.
— Tu veux pas non plus que je me glisse toute nue dans ta combinaison antiradiation, histoire de te tenir chaud ?
— Ça me ...
... tente, mais non. J’aurais trop peur de t’écraser !
— Espèce d’idiot ! Attends que je refasse un peu de muscle, on en reparlera !
— Peut-être, mais là tout de suite, je vais devoir…
— … m’attacher, je sais. C’est affreux, les hommes sont tous fous de mon corps.
Il n’y avait que six kilomètres à faire, mais Eva n’avait pas la condition physique nécessaire pour s’accrocher à moi tandis qu’on slalomerait à travers un océan de bagnoles carbonisées, sur un mini quad instable. Je l’aidai à enfiler sa combinaison, vérifiai encore une fois mon sac à dos puis m’équipai à mon tour. Eva ne jeta pas un regard au cadavre de son ex-tortionnaire en traversant le sas pour quitter l’abri. Mais une fois dans les couloirs décrépis de l’hôpital, je sentis qu’elle flanchait. J’imaginais sans peine ce qu’elle devait ressentir en voyant l’état de ces locaux, autrefois familiers et chaleureux. J’esquissai un geste de réconfort ; elle me fit simplement signe de continuer.
Je fus plus qu’heureux de retrouver la lumière du jour. Mon fidèle carrosse nous attendait et démarra sans renâcler. Je poussai un soupir : bien que je n’en aie rien dit à Eva, je craignais que les radiations ne l’aient déjà endommagé. Je m’installai au guidon, puis invitai Eva à grimper. Après une courte hésitation, elle s’assit derrière moi. J’avais gardé à la main un gros rouleau d’adhésif et la scotchai littéralement à moi, fixant ses cuisses aux miennes par plusieurs tours de bande argentée. Elle se colla contre mon dos ...