Flash-Back
Datte: 19/04/2019,
Catégories:
contrainte,
nonéro,
sf,
Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe
... trouve à foison ces divers ingrédients. Pourtant, rien de tout cela ne lui apportait le moindre début de réponse à ce vide intérieur lancinant. Lucien Gatimel ne trouvait toujours pas le chemin menant à la sérénité, à la paix avec lui-même.
C’est à l’occasion d’une virée en famille dans sa maison d’enfance qu’il découvrit enfin « sa voie ». Planqué sous une pile de linge défraîchi, dans le fond d’une armoire, l’attendait un vieux cahier d’écolier. Sur ses pages, près de vingt-cinq ans en arrière, le jeune Lucien avait couché d’une écriture encore hésitante et malhabile quelques poésies et autres fariboles…
En exhumant ce fossile d’adolescence, Gatimel eut une sorte de révélation : reprendre ce travail d’écriture allait enfin débarrasser son esprit des pensées toxiques qui le rongeaient ! Il devait s’employer à transmuter son expérience de la vie et ses sombres désespoirs en allégories littéraires.
Lucien Gatimel se lança alors avec fougue dans l’écriture de nouvelles pour la jeunesse, puis dans le roman policier. Durant plusieurs années, ses manuscrits ne suscitèrent que des lettres de refus polies – du moins, quand il osait les envoyer aux éditeurs de la place - et, au mieux, l’indifférence de ses proches ; indifférence qui se mua assez vite en agacement plus ou moins contenu.
Gatimel ne se découragea pas. Avec raison, d’ailleurs, car en fin de compte, il parvint à se faire publier… même si la maison d’édition en question n’était guère plus que le prête-nom d’un ...
... imprimeur argenté de province ! Sans tenir compte des mises en garde de son entourage, il prit alors le risque d’abandonner son job de juriste pour se consacrer à plein-temps à sa nouvelle vie d’auteur « en émergence ».
Flora, son épouse, supportait stoïquement ce chambardement de cap, malgré la réduction drastique de leur train de vie. On était loin des fastes d’antan ! Sa maîtresse, quant à elle, le plaqua illico pour un jeune trader, étoile montante des salles de marché d’une grande banque internationale.
Le quotidien de Gatimel s’illuminait : il était en phase avec ses aspirations les plus essentielles. Suivre cette vocation d’écrivain, longtemps occultée par d’autre préoccupations plus matérialistes, redonnait enfin un sens à son existence. Grâce à un travail acharné et une vie plus saine, Lucien Gatimel se sentait devenir un homme meilleur ; il goûtait enfin à la bienheureuse plénitude de relations conjugales apaisées.
Sa moitié, quelque peu réticente au départ, avait fini par trouver un travail ; il n’y avait guère d’autres choix pour leur éviter de crever de faim… Malgré un succès d’estime, les revenus qu’il tirait de « son œuvre » restaient dérisoires. Le labeur ingrat de Flora leur permettait au moins de faire bouillir la marmite !
L’étoile de Gatimel se mit soudain à briller haut et fort : «Les exilés », son sixième roman, venait de décrocher le prix Médicis 2003. Gatimel, qui n’avait connu jusqu’à présent qu’un anonymat abyssal, allait enfin goûter aux ...