1. Les premiers - Episode 3


    Datte: 21/03/2019, Catégories: aventure, sf, fantastiqu, Auteur: Jean de Sordon, Source: Revebebe

    ... et rire de ce rêve absurde.
    
    Cédant à une colère soudaine, il donna un grand coup de pied à un caillou qui traversa la place.
    
    — Où sommes-nous, bordel ? Dans un lointain avenir ? Dans un temps parallèle ?
    — Disons que nous sommes sur Terre-ter, répondit le Japonais sans penser le moins du monde à faire de l’humour.
    
    Abraham levait le pied pour envoyer au diable un second caillou, il le laissa retomber, en proie à une lassitude soudaine.
    
    — Et l’enseigne ? Aux amis de la Terre… Hasard ?
    — Peut-être… On a vu pire.
    — Pire ? Mes couilles ! rugit Abraham. La vérité, tu la veux ? Eh bien, le monde qui nous entoure n’est pas cohérent. En sautant avec l’Albert, nous sommes passés dans le monde du rêve.
    — Oui, admit le Japonais, c’est bien ainsi que je vois les choses, moi aussi. Mais la question suivante…
    — C’est : qu’allons-nous faire à présent ?
    — Exactement. Nous pouvons revenir chez nous… et laisser les théoriciens expliquer ce que nous avons vécu.
    — Si Enigma nous permet de faire le voyage dans l’autre sens.
    — Oui. Ou poursuivre l’aventure et amasser davantage d’informations… au risque de ne jamais retrouver le chemin du retour.
    
    Le petit Japonais s’assit en tailleur parmi les hautes herbes.
    
    — Au fond, observa-t-il, ce rêve n’a rien d’un cauchemar. Le séjour à Terre-bis fut plutôt plaisant.
    — Tu oublies que nous avons failli y laisser notre peau…
    — Je ne l’oublie pas. Mais je soupçonne que nous n’avons jamais couru le moindre danger : il fallait ...
    ... seulement que nous effectuions le voyage avec Enigma… et nous l’avons effectué. Depuis le début, rien n’a eu lieu par hasard.
    
    Par la fenêtre, leur parvinrent les râles de jouissance de Bettina.
    
    — Je crois, conclut Hiroko, que nous devons avoir confiance et laisser les choses suivre leur cours.
    
    Il y avait plusieurs variétés de poisson, en même temps qu’un potage dans lequel nageaient des lamelles de ce qui pouvait bien être du chevreau bouilli. Sur la table étaient disposées de grosses miches de pain à couper en tranches, du beurre et de la confiture pour le tartiner. Une grosse salade venait ensuite et le dessert brillait par son absence, même si les brocs de jus de fruit semblaient inépuisables. Après le copieux petit déjeuner, les terriens ne purent faire honneur à la chère, mais le reste des convives semblait manger de bon appétit.
    
    — Comment font-ils pour ne pas grossir ? s’étonna Abraham.
    — Beaucoup d’exercice physique, répondit Hiroko.
    
    C’était à l’évidence une société où l’on ne se souciait guère d’étiquette à table. Il y régnait un brouhaha de cris, de rires, de vaisselle brutalement maniée.
    
    Bettina et Jola, les yeux dans les yeux, se faisaient la becquée.
    
    — En voilà une qui n’est pas pressée de partir ! dit Abraham.
    
    Il devait forcer sa voix pour se faire entendre. Ils allèrent s’asseoir devant la porte pour avoir un peu de silence.
    
    — J’ai encore fait ce cauchemar, dit Catherine.
    
    Elle hésitait, cherchant les mots qui rendraient le plus fidèlement ...
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