1. Sans mâle et sans tabou 1


    Datte: 13/09/2018, Catégories: ff, inconnu, voiture, volupté, dispute, Auteur: Nicky Gloria, Source: Revebebe

    C’est un triste matin dominical, comme Michèle Seigner les déteste. Sombre, maussade, comme son humeur. Debout devant la baie vitrée, elle parcourt le parc du regard. L’aube se lève, impitoyable, donnant de ternes couleurs aux arbres majestueux, pins et eucalyptus, qui projettent leur ombre sur une vaste pelouse habituellement bien entretenue. Elle contemple les arbres bercés par le vent, un fort mistral qui fait également onduler et frissonner tous ses massifs de géraniums, hortensias et fuchsias. Épines et pétales parsèment le sol, donnant à son jardin des allures d’abandon. Elle pourrait profiter de cette journée de repos pour jardiner, se consacrer à ses loisirs, à ses plaisirs, faire comme tout le monde.
    
    Mais elle sait que ce ne sera pas un dimanche comme les autres. Pourtant, elle aurait aimé passer quelques minutes dans le jardin, juste derrière la tonnelle, dans son sanctuaire luxuriant et multicolore. Un havre de paix où elle aime se réfugier lorsqu’elle a besoin d’être seule, de réfléchir, de trouver un remède à ses soucis ou à ses problèmes. Une façon comme une autre de fermer les yeux, de fuir la réalité et rêver d’un monde meilleur où elle ne cesse d’établir et de changer les règles selon ses états d’âme. Une solution de facilité qu’elle maîtrise à la perfection depuis tant d’années, et qui n’a jamais rien changé.
    
    Mais, aujourd’hui, elle veut que ça change.
    
    Elle n’en peut plus, la coupe est pleine, elle se sent au bord de la dépression, prête à basculer ...
    ... dans le vide. Quel nom donner à ce trou béant qui vient de s’emparer de tout son être ? Elle l’ignore, mais elle doit réagir, prendre son courage à deux mains et s’en aller. Pourtant, elle hésite toujours, la valise à ses pieds. Les forces lui manquent. Comment peut-on tourner le dos à huit ans de vie commune ? Comment peut-elle douter ainsi de tout ce qu’elle a construit et se laisser si facilement submerger par le doute, la culpabilité, la panique, par des sentiments si intenses et si complexes qu’elle ne sait plus où elle en est. La réponse n’est plus ici, dans sa maison, leur maison, où la routine va reprendre inexorablement ses droits.
    
    Un mouvement derrière elle l’arrache à ses sombres pensées. Son mari vient d’apparaître dans le séjour, s’appuyant contre la porte comme si les forces lui manquaient. Son visage est livide, d’un blanc cireux. Il garde les yeux fixés sur la valise, un long moment. Puis son regard reflète la plus grande incompréhension lorsqu’il la regarde de nouveau, un regard de chien battu, triste et malheureux. Un regard qui supplie et qui veut l’attendrir. Elle ne le supporte pas, s’affole, par peur de céder encore, comme elle le fait depuis tant d’années. Elle se sauve précipitamment, s’enfuyant comme une voleuse de sa propre maison.
    
    Elle se retrouve près de sa voiture sans s’en rendre compte. Elle s’appuie contre la portière, les jambes tremblantes. Puis, brusquement, elle part d’un fou-rire qu’elle est incapable de maîtriser. C’est de la peur, ...
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