Modèle d'un soir - Histoires de Sexe

Modèle d'un soir

Encore quelques mètres avant de me jeter dans l’inconnu.

Tout ça pour un foutu accident de moto qui a perturbé mon quotidien plus que je ne le pensais.

Une grande porte cochère, un passage sous une arche en pierre de taille, un patio précédant un sublime immeuble haussmannien. J’entre dans ce bâtiment qui, d’un extérieur conventionnel, se transforme en un hall très moderne où trône une hôtesse d’accueil avec une tablette et un sourire exagéré.

— Bonsoir, Madame, puis-je vous orienter ?
— Bonsoir, oui, je cherche l’Atelier d’Art du Soir.
— Vous êtes attendues ? Votre nom peut-être ?
— Éloïse, je dois participer à l’atelier Croquis de Monsieur Dutaire, lui dis-je.
— Prenez l’ascenseur à droite pour le 6e étage, l’atelier sera fléché. Mais celui-ci n’est censé commencer qu’à 20 h 30, vous devrez peut-être attendre dans le petit salon. Bon atelier et bonne soirée.

Dans l’ascenseur, mon cœur bat déjà la chamade. Vais-je pouvoir surmonter mes appréhensions ?

Le palier, puis la porte entrouverte m’invitent à entrer. Un homme, la quarantaine, est debout, penché sur un bureau et griffonne sur une feuille. Il lève la tête sans même m’apercevoir pour la replonger sur sa feuille et lance un « Bonjour, installez-vous derrière un chevalet à votre convenance ». Puis, brusquement, se redresse, grand sourire vers moi.

— Pardon, mes excuses, je vous avais pris pour un élève ! Vous devez être Éloïse ? On m’avait dit que vous viendriez avant, afin que nous parlions de la ...

... séance.
— Bonsoir, oui c’est bien moi, mais peut-être suis-je en avance ?
— Non, non, c’est très bien, nous allons pouvoir bavarder et bien préparer la séance. Je me présente, je suis Adrien Dutaire, le professeur de dessin qui supervise cet atelier du mardi soir. C’est moi qui suis à l’origine du programme Confiance en partenariat avec l’hôpital de Garches. Vous y avez rencontré le Professeur Dutaire qui n’est autre que mon frère. Nous avons une petite demi-heure avant le début de la séance… si nous prenions un café et que vous me parliez de vous afin que l’on puisse vous amener à un réel bénéfice de ce programme. Mais commençons par nous tutoyer si cela te va !

D’un signe avenant de la main, Adrien m’invite vers le fond de l’atelier que je découvre malgré les quelques secondes où je suis déjà là. Un plafond double hauteur, une pièce ouverte sur l’extérieur au travers d’une baie vitrée moderne sans vis-à-vis et qui malgré l’heure avancée est très lumineuse. Au centre, une estrade ronde recouverte d’un tissu en velours bleu sombre crée un vide dans cet espace et un demi-cercle de projecteur au plafond. Autour de l’estrade sont placés à intervalles réguliers une dizaine de pupitres, de trépieds de dessin accompagnés d’un tabouret haut. Il n’y a pas de doute, la pièce est orientée vers son centre d’attention : l’estrade.

Le bruit de la machine Nespresso me sort de ma contemplation.

— Alors, racontez-moi ! me dit-il en me tendant le breuvage fumant et dégageant une ...