Pom, pom, pom... (Fraîcheur corrompue) - Histoires de Sexe

Pom, pom, pom... (Fraîcheur corrompue)

L’antilogie « fraîcheur corrompue » m’a tentée. Mais très vite je me suis retrouvée avec un texte trop long, beaucoup trop long, en dehors des règles du jeu. Voici donc le fruit de l’exercice associant ces deux mots.

Assis sur l’herbe tendre, Ève et Adam regardaient le fleuve couler en contrebas. Le soleil pointait sur l’horizon. Un spectacle magnifique. Tout était magnifique ici. Le ciel, les oiseaux, les arbres : magnifiques. Ève et Adam, magnifiques.

Le jardin était rempli de fruits succulents dans lesquels ils croquaient chaque jour avec bonheur. Cette alimentation exclusivement frugivore posait certes de petits problèmes post-digestifs, mais le Créateur, dans son infinie sagesse, avait doté l’Éden d’arbres aux feuilles larges, douces, et d’une triple épaisseur.

Ève vit s’approcher une silhouette inhabituelle. L’individu portait comme une seconde peau sur la première, assez lâche et pourtant élégante, noire, constituée d’une matière qu’elle ne put identifier. Ce qui est normal : Ève n’avait jamais vu un costume Versace, ni des santiags en python. Elle ignorait tout de la notion de vêtement, et elle n’avait jamais imaginé qu’il puisse exister un autre homme que son Adam.

Ève et Adam se regardèrent. Ils n’étaient pas inquiets car ils ignoraient l’inquiétude. Rien dans le jardin ne pouvait susciter la moindre frayeur, toutes les créatures le peuplant étant douces et paisibles. Et magnifiques.

Pourtant il émanait de l’inconnu une étrangeté qui générait des ...

... sentiments nouveaux. Il souriait doucement, son regard caché par deux ellipses noires liées par un fil de métal. Ève n’avait jamais vu de lunettes de soleil Gucci non plus. L’inconnu était maintenant à leur hauteur.

— Salut les jeunes, tout roule ?
— Euh… les cailloux roulent, lorsque la pente est forte et la pierre arrondie, mais le reste est assez stable, répondit Adam.
— Ouais, je vois. C’était juste une façon de parler. Pas grave. Dis, elle est plutôt bonasse ta copine, hein !
— Vous voulez dire aimable ?
— Non, je veux dire qu’elle donne envie de lui mettre un coup !
— Pourquoi voudrais-je la frapper ?
— Bon, je vois où est le blème. Toi t’es vraiment con. Heureusement la pépette a l’air plus aware. Salut ma belle ! C’est toi, Ève ? Moi, c’est Lucifer.

L’homme n’était pas d’ici. On ne l’avait jamais vu dans le jardin, ce qui était un signe, et son langage étrange ne pouvait que signifier une origine lointaine. Ève était troublée. Quelque chose lui disait que ce Lucifer n’était pas quelqu’un de bien, mais elle se sentait attirée.

— Vous faites quoi de vos journées ?
— Nous contemplons le paysage magnifique et nous mangeons des fruits magni… délicieux.
— Oui, nous vivons un bonheur ineffable.
— Je vois. En gros vous vous faites chier comme des rats morts. Bon, heureusement que je suis là ! Je vais vous montrer quelques trucs. Toi, le grand dadais, regarde bien.

Lucifer s’était approché d’Ève. Debout, splendide dans sa naïve nudité, elle attendait. ...