Une fille aux yeux verts - Histoires de Sexe

Une fille aux yeux verts

... un jour qu’elle supporterait volontiers d’être violée si elle était certaine d’en avoir de beaux enfants, m’avait raconté la scène. Elle m’avait même invité ensuite à la jouer avec elle :Je serais une Gauloise, tu serais un soudard - quel drôle de mot ! Et elle riait, comme la petite folle qu’elle a toujours été, ma charmante cousine, primesautière et saute-au-paf comme pas deux. J’eus une pensée émue pour elle, et même un désir rétrospectif qui me conduisit à regarder avec convoitise les jeunes filles assises derrière leur guichet.

— Savez-vous, leur demandai-je, que la victoire des Gaulois a été obtenue grâce à l’action - je ne dirai pas grâce au sacrifice - de leurs femmes et de leurs filles ?

Elles l’ignoraient. Elles voulurent naturellement savoir ce qui s’était passé.

— Les légions romaines montaient à l’assaut du plateau. Les femmes quittèrent le camp gaulois alors que leurs compagnons se rhabillaient en toute hâte - je vous laisse imaginer, mesdemoiselles, à quoi ces jeunes gens étaient occupés juste avant - et allèrent à la rencontre des assaillants. Celles qui étaient quelque peu vêtues dénudèrent leur poitrine et relevèrent leurs jupes. Les autres étaient déjà nues. Dans la cervelle du combattant le plus obtus germe parfois la pensée qu’il vaut mieux faire l’amour que la guerre. L’escalade changea donc d’objectif. Les épées de chair remplacèrent les épées de métal car ce ne fut pas leur arc que bandèrent les archers. Les centurions choisirent les plus ...

... jolies, vos ancêtres, presque aussi mignonnes que vous, déjà !
— Mais que faisaient les Gaulois, pendant ce temps ? me demanda, comme effarée, une piquante brunette qui avait une frange et de grands yeux noirs.
— Les Gaulois, ah, les Gaulois… Certains avaient rêvé, sans trop oser le dire, de voir leur épouse ou leur maîtresse baiser avec un autre. Ils en eurent donc la gaule. D’autres étaient mécontents. Quelques-uns même furent vraiment fâchés et du sang impur abreuva leurs sillons. Mais d’autres sillons avaient été abreuvés d’une autre liqueur, voilà pourquoi tu es brune et ressembles à Carla Bruni. Tu es libre ce soir ?

Elle cessa de rire, regarda ses collègues, rougit et ne répondit pas.

— À quelle heure fermez-vous boutique, jeunes filles ?
— À 19 heures, mais mon fiancé vient m’attendre.
— Quel dommage ! Et vous, mesdemoiselles ?
— Moi, personne ne vient m’attendre, me dit une blonde au corsage rempli.
— À ce soir, donc.

Je me suis reproché peu après de ne pas l’avoir invitée à déjeuner. Puis j’ai estimé que manger seul pouvait me permettre de faire d’autres rencontres. Il n’en fut rien.

Plus tard, devant la statue d’Urbain II qui prêcha la Première Croisade se trouvait un groupe de jeunes gens. Comme je m’approchais d’eux, une fille me héla :

— Tu viens d’où, toi ?

Je crus devoir reprendre mon faux accent québécois et répondis que je venais de la banlieue de Montréal. Je compris que ces jeunes, qui me considérèrent aussitôt comme l’un des leurs, ...