1. Perdus


    Datte: 27/04/2021, Catégories: nonéro, aventure, sf, Auteur: Gufti Shank, Source: Revebebe

    ... nous offrant un peu de sa chaleur agréable. Elle ne tarda pas à s’endormir et de nouveau je gambergeais. Fuir ! Sortir de là ! Suivre le courant ! Je nous imaginais, Alys et moi, coincés ici vieillissant tout maigres à ne plus avoir qu’à partouzer à l’infini avec nos loqueteux et squelettiques compagnons d’infortune. Repérer le courant… Oui, mais comment ? Une corde… une ficelle… et voir dans quelle direction elle s’en allait. Mais voir quoi ? Il n’y avait rien à voir…
    
    ***
    
    Je me rendormis finalement, et lorsque je m’éveillai, toujours au milieu des deux femmes, j’étais fermement résolu à essayer de laisser flotter un fil pour deviner la direction du courant. M’extrayant des bras chauds qui me ceignaient, je me saisis de la tunique trouée dont Alys s’était vêtue en s’échappant de Tal-Mania et cherchai à en arracher quelques fibres. Au second essai, j’en tirai un brin de près d’un mètre. Il s’agissait de ne pas le perdre. Je l’enroulai à mon poignet, et recommençai la manœuvre.
    
    Le bruit du tissu déchiré éveilla rapidement les deux femmes. Alys s’étonna un instant de découvrir Anika couchée à côté d’elle, puis de réaliser que j’avais retrouvé nos vêtements et enfin de constater que j’étais en train de déchirer le sien.
    
    — Qu’est-ce que tu fais ?
    — Des fils. Je veux trouver où va le courant. Et vaille que vaille, nous le suivrons.
    — Tu veux replonger dans le lac ? s’alarma ma compagne.
    — Tout vaut mieux que de pourrir ici.
    — C’est de la folie ! fit Anika. Tout ...
    ... ce que tu gagneras, c’est d’aller pourrir un peu plus loin dans les entrailles de la terre. La ville est au-dessus de nous. C’est en haut qu’il faudrait pouvoir s’échapper.
    — Vous avez déjà essayé ? demanda Alys.
    — Oui, nous avons tout essayé ! Nous avons escaladé toutes les parois, suivi toutes les cavernes, en vain.
    
    Mais j’ignorai ses avertissements funestes et me consacrai tout entier à mon entreprise, jusqu’à avoir une vingtaine de morceaux enroulés à mon poignet ou à ma jambe. Et je nouai bientôt une à une les extrémités de ces épais brins de filasse, formant une sorte de fine cordelette de près de quinze mètres de longueur.
    
    Anika me guida ensuite jusqu’au bord du lac, et j’y jetai ma ficelle, attachant l’autre bout à mon poignet. Et j’attendis.
    
    — Et alors ? Comment sauras-tu dans quelle direction part ton fil ?
    — Il faudra le sentir.
    
    Nos voix et mes micmacs avaient dû attirer les hommes, car je les entendis soudain derrière moi s’adresser à leur compagne.
    
    — Qu’est-ce que vous faites ?
    — Il cherche le courant. Il veut s’enfuir par le lac.
    — Vous n’avez rien qui puisse faire office de radeau ? demandai-je à tout hasard.
    — Tu crois pas que si on avait ça, on s’en serait déjà servi ?
    
    Alys s’approcha pour me chuchoter à l’oreille :
    
    — Tu veux vraiment qu’on retourne dans l’eau ?
    — Tu préfères rester ici ?
    
    Le souffle de son soupir caressa mon épaule. Devant moi, je sentais la ficelle dévier lentement sur ma gauche.
    
    — On y va ? fis-je d’un ton ...
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