1. Métamorphose


    Datte: 13/03/2021, Catégories: nonéro, Humour sf, Auteur: Hidden Side, Source: Revebebe

    ... premier numéro pour les renseignements téléphoniques qui lui vint à l’esprit. Au bout d’une longue attente, la voix douceâtre d’une opératrice lui demanda ce qu’il voulait.
    
    — J’aurais besoin du numéro des urgences psychiatriques, mademoi…
    
    Sa phrase s’interrompit sur un hurlement strident, qui dut certainement percuter de façon fort douloureuse le tympan de la téléopératrice. Sa voix ! Sa voix, elle aussi, avait changé ! C’était une hallucination multisensorielle… Il poursuivit néanmoins, avec l’impression que Pierre Richardhimself exécutait une sorte de doublage de la bande-son en simultané :
    
    — Vous êtes toujours là, mademoiselle ? Mes excuses, je… je viens de me faire tomber un dictionnaire sur le pied. Un gros. Ça m’arrive souvent, une sorte de manie ! dit-il, avec un aplomb indiscutable qui lui était tout à fait étranger.
    
    C’était venu tout seul, comme la réplique comique d’un script appris par cœur. Il entendit bougonner à l’autre bout du fil, et soudain un automate lui dicta le numéro de téléphone des urgences de l’hôpital Sainte-Anne.
    
    oooOOOooo
    
    Après un bref coup de fil à la secrétaire chargée du dispatching des cas désespérés, on lui indiqua que le psychiatre de garde le recevrait, mais seulement s’il pouvait être là dans la demi-heure. Un peu soulagé à la perspective d’être pris en charge par le susdit spécialiste, Francis Pichon enfila son trench-coat et sortit de son deux-pièces du troisième – porte de gauche - en croisant les doigts pour ne ...
    ... croiser personne, justement.
    
    Maldita ! Comme à son habitude, Madame Gonzales, la gardienne de l’immeuble, papotait à la porte de sa loge – avec la discrète voisine du dessus, pour une fois. Il attendit plusieurs minutes sur le palier du second, immobile et silencieux, que la commère épuise sa salive ou bien la patience de la jolie blonde. Peine perdue, ces deux denrées semblaient ne pas devoir faire défaut rapidement ! Décidant de tenter un « discret » passage en force, il releva le col de son manteau, baissa la tête et avala les marches par paquets de quatre, levant bien haut les genoux afin de ne pas s’étaler.
    
    Pichon arrivait à leur hauteur, confiant dans la subtilité de sa manœuvre d’évitement, quand Maria Gonzales l’apostropha :
    
    — Bondjou l’mossieu Bichon ! Dj’ai deux mots à vous dil’, fit-elle, avec son inimitable accent vietnamien.
    
    La concierge avait eu l’étrange idée d’épouser en secondes noces un plombier portugais, tout en hispanisant, de surcroît, son prénom ; Pichon la suspectait d’avoir cherché ainsi à optimiser son employabilité dans le gardiennage d’immeuble, secteur trusté par les Ibères à moustache de plus de cinquante ans.
    
    Il stoppa net à quelques pas des deux femmes et, toujours masqué par le col de son manteau, s’enquit à voix basse de ce que la gardienne lui voulait. Une question lui taraudait l’esprit : qu’allait-elle penser de sa nouvelle voix ? Bizarrement, elle ne sembla rien remarquer.
    
    Au contraire, madame Gonzales poursuivit avec rancœur ...