1. Claire


    Datte: 15/01/2021, Catégories: jeunes, campagne, nonéro, portrait, sorcelleri, historiqu, Auteur: Musea, Source: Revebebe

    ... leur haine, leur mépris. Mon père les a déjà subis suffisamment quand maman est morte accidentellement dans la voiture des Bergheaud. Je n’ai pas envie de prêter plus le flanc aux racontars.
    — Et tu crois que te cloîtrer résoudra le problème ? Mais c’est justement le contraire ! Plus tu te caches, plus les commères inventent des histoires à dormir debout.
    — Raison de plus pour m’abstenir de toutes ces fêtes.
    — Mais tu ne vas pas les laisser continuer de t’insulter ?
    — Écoute, je ne vais peut-être au village que deux fois par semaine, pour le marché, mais c’est amplement suffisant pour me rendre compte de la méchanceté des gens à mon égard. S’il ne me fallait pas vendre les oeufs, le beurre, le miel et les fromages de la ferme, je me passerais fort bien de tout contact avec eux.
    
    Anita soupira :
    
    — Pourquoi tu ne te défends pas ?
    — Parce que je n’ai pas envie de gaspiller du temps et de l’énergie. Je n’ai rien à dire à ces gens, c’est tout.
    
    Claire, les sourcils froncés, attrapa les draps qu’elle avait rincés puis essorés dans une bassine et sortit derrière la maison pour les faire sécher au soleil. Anita la suivit en silence, et pendant qu’elles tendaient et défroissaient le linge sur la corde, elle crut bon de piquer la curiosité de son amie, comme on abat sa dernière carte :
    
    — Pourtant… Mais inutile de te dire ça, ça te fera pas venir de toute façon, ronchonna-t-elle.
    
    Un soupir d’agacement lui répondit derrière un drap de toile. Claire détestait les ...
    ... insinuations et les bouderies de son amie. Mais inquiète, ne voulant pas envenimer leur dispute par du mépris, elle interrogea :
    
    — Pourtant… quoi?
    
    Anita sourit. Claire, même retranchée de la vie du village, aimait la gazette qu’elle lui contait régulièrement sur les habitants et les évènements les plus cocasses de St Amant. Et la jeune fille en était sûre : c’était peut-être le meilleur moyen de persuader son amie, au moins par curiosité, de venir à la fête. Avec une mine gourmande de conspiratrice, elle commença :
    
    — Tu te rappelles la maison de Monsieur Bergheaud, le maréchal-ferrant ? Un parisien y habite depuis presque deux mois aujourd’hui.
    — Ah… et alors ?
    — Et alors ? C’est un homme qui, quand il te regarde, te déshabille littéralement. Enfin, si tu es une dame, bien sûr ! Il doit avoir trente ou quarante ans au plus. Pas vraiment beau, mais des yeux, une prestance… Oh là là ! Je donnerais cher pour danser avec lui et je crois que je ne suis pas la seule ! Mais j’oserai jamais si tu n’es pas là…
    
    Claire sourit, amusée. Anita décidément avait le don de dire les choses !
    
    — Donc, en résumé, si tu me fais cette comédie depuis une heure, c’est pour que je vienne et tienne la chandelle ce soir !
    — Ohhhhhhhh, tout de suite les grands mots !
    
    Claire pouffa, achevée par tant d’aplomb et de mauvaise foi et elle répliqua avec malice :
    
    — Déjà quand nous étions petites, tu n’aurais jamais laissé filer un garçon ! À vingt ans, tu ne changes pas ! Rien que d’imaginer la ...
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