Désespoir - Histoires de Sexe

Désespoir

... voix monocorde. Il dit que Luc devrait devenir archiviste. Sa manière de classer et gérer les dossiers, les fiches de suivi et de commentaires, avec des liens directs, est vraiment remarquable. Cependant photographe ou caméraman lui conviendrait aussi fort bien. Julie ne répond pas. Les minutes passent. La jeune femme se sent mal, comprend la douleur de son chéri, mais ne sait comment y réagir. Jusqu’à ce qu’il lâche :

— Enfin, grâce au savoir-faire de ce cher Luc, j’ai découvert des talents et des facettes de ta personnalité que je ne te soupçonnais pas.

Le silence s’installe, s’éternise. D’une voix mal assurée Julie se décide, bien que redoutant ce qui va suivre, à demander de quel talents Bernard parle.

— Ton goût pour le jeu. Tu n’hésites pas à relever des défis et à te lancer dans des compétions. J’ignorais également combien tu appréciais les promenades en groupe à la campagne. Tes talents de danseuse m’ont également impressionné. Ainsi que ton hospitalité, la manière dont tu accueilles les gens chez toi ou en toi. Je ne parle pas de ton esprit inventif quant au détournement de l’usage d’objets les plus divers. Je savais que tu aimais servir de modèle, mais je ne soupçonnais pas que ce soit à un tel degré. Mais ce qui m’a le plus impressionné c’est ta capacité à rentabiliser tes loisirs de façon…
— Arrête !… Ton ironie me fait mal.
— Je n’ironise pas
— Alors c’est bien imité.
— Que veux-tu que je te dise ? Tu baises, tu suces et tu te fais enculer ...

... par tout ce qui passe, surtout si il y a du fric à ramasser. Que vu le nombre de mecs et de donzelles aussi qui te sont passé dessus, tu dois en croiser régulièrement dans la rue, que tu ne reconnais sans doute même pas ! On ne peut se souvenir de tant de monde. Avec toi Luc avait tiré le gros lot. Pas besoin de te pousser, tu allais au turf sans rechigner. Si l’on additionne la longueur des queues et des divers objets que tu t’es enfilée par tous les trous, le total représente une sacrée randonnée. Quant aux litres de foutre que tu as avalés ou pris sur la gueule, ils rempliraient un tonneau de bonne taille.

Julie s’est décomposée au fur et à mesure du discours de Bernard. Elle voit que tout ce à quoi elle tient s’effondrer. Elle le regarde éperdue, se mordant le poing jusqu’au sang. Elle voudrait dire quelque chose, parler, expliquer que durant cette période de sa vie, elle était déconnectée des réalités. Avec Luc elle était entrée dans un autre monde. Quand elle avait réalisé, elle avait réagi. Cette Julie n’était plus qu’un fantôme. Elle voudrait lui dire qu’elle l’aime, qu’elle l’aime par-dessus tout. Et surtout, surtout, que comme Ariane elle porte un enfant de lui.

Mais aucune parole sensée ne sort. Elle ne réussit qu’à hurler.

— Arrête !

Il se tait et la regarde d’un œil éteint. Ce regard achève de la déstabiliser. Elle a la gorge nouée, les larmes lui montent aux yeux. Elle tend la main vers lui. Il ne fait pas le geste de la saisir. Elle la laisse ...